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Politique

Le suprémaciste blanc derrière les politiques anti-immigration de Donald Trump

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C’était presque hier, mais l’événement paraît bien plus lointain.

En 2019, la découverte des liens étroits tissés entre Stephen Miller, conseiller politique principal de Donald Trump à la Maison-Blanche lors de son premier mandat, et les mouvements suprémacistes et nationalistes blancs avait déclenché une vague d’indignation.

C’est que, quelques années plus tôt, dans une série de courriels adressés au média ultraconservateur Breitbart, Miller avait appelé son éditrice, Katie McHugh, à faire rayonner dans son espace médiatique le livre Le camp des saints, du Français Jean Raspail, avec l’intention clairement affichée de nourrir, par l’exagération, la défiance envers l’immigration. La droite américaine s’accrochait alors à la peur de l’autre pour revenir au pouvoir.


Ce roman raciste est très populaire dans les cercles de l’extrême droite, du nationalisme identitaire et des mouvements néonazis. Il met en scène un « génocide blanc » et structure, par la fiction, la théorie complotiste du « grand remplacement » qui fait planer le spectre d’une disparition des populations locales dans plusieurs pays occidentaux, sous l’effet délibéré de politiques néolibérales et progressistes trop accueillantes.

À l’époque, plus de 100 membres du Congrès, une cinquantaine d’associations de défense des droits civiques et plusieurs chroniqueurs ou personnalités publiques avaient appelé à la démission du conseiller ou au mieux à son licenciement par la Maison-Blanche. En vain.


En novembre 2019, l’animatrice de fin de soirée du réseau TBS, Samantha Bee, s’emporte. Dans un segment intitulé « Bordel, virez Stephen Miller maintenant ! », elle dit : « Si nous ne parvenons pas tous à convenir qu’un suprémaciste blanc n’a rien à faire à la Maison-Blanche, alors nous devrions tout simplement éteindre les lumières sur cette grande expérience américaine. »

Cinq ans plus tard, la lumière n’est pas encore totalement éteinte sur l’Amérique de Donald Trump, mais le filament de l’ampoule vacille fortement.

Loin d’avoir été emporté par ses controverses du passé, Stephen Miller a pris du galon au sein même du Bureau ovale, où il agit désormais à titre de chef de cabinet adjoint de la Maison-Blanche et conseiller à la sécurité nationale depuis le retour du populiste à Washington.

C’est à lui que l’on doit l’écriture du décret signé dans les heures qui ont suivi l’intronisation du président visant à mettre fin au droit du sol pour les enfants de parents sans papiers nés aux États-Unis. C’est lui qui, durant la campagne électorale, a promu en coulisses l’idée de d’expulsions de masse défendue en public par Donald Trump, tout comme celle d’envoyer l’armée à la frontière pour défendre le pays contre une soi-disant invasion.

Il a aussi été le catalyseur des arrestations massives d’immigrants dans plusieurs villes démocrates du pays, dont Los Angeles, et du chaos qui a suivi. En mai, Miller a ordonné aux agents de l’immigration de ne plus suivre les règles habituelles pour traquer les immigrants en situation irrégulière après enquête pour, à la place, se lancer directement à leur poursuite sans mandat dans les couloirs des tribunaux, des bâtiments fédéraux, mais aussi dans les lieux de travail, les restaurants, les dépanneurs…

Sur Fox News, l’homme qui parle à l’oreille du président a indiqué que le niveau d’arrestation de sans-papiers allait grimper à 3000 par jour, soit 10 fois la moyenne de 311 par jour établie sous Joe Biden. Et il compte sur la délation pour y arriver.

Début juin, il a republié sur X une caricature produite par un suprémaciste blanc de ce réseau utilisant la figure de l’Oncle Sam appelant les Américains à « dénoncer tous les envahisseurs étrangers » à la police de l’immigration et des douanes (ICE), dont le numéro est inscrit en bas de l’affiche. Ce concept d’envahisseur étranger était au centre du discours du « national-socialisme » allemand à une autre époque. Le même dessin, issu des milieux néonazis et nationalistes blancs, a aussi été publié par le compte officiel du département de la Sécurité intérieure (DHS).

Si nous ne parvenons pas tous à convenir qu’un suprémaciste blanc n’a rien à faire à la Maison-Blanche, alors nous devrions tout simplement éteindre les lumières sur cette grande expérience américaine.

— Samantha Bee, animatrice de fin de soirée du réseau TBS, en 2019

Un des cerveaux du trumpisme

« Stephen Miller est responsable de toutes les mauvaises choses qui se passent aux États-Unis », estime le sénateur démocrate du Nouveau-Mexique Ben Ray Luján, cité par NBC, en rappelant que ce conseiller a été à l’origine de « certaines des politiques les plus laides » du premier mandat de Trump. Celle dite de la « tolérance zéro », visant à séparer les enfants d’immigrants de leur mère à la frontière, en fait partie.

« Stephen, c’est le “ça” du président », ajoute sur le même réseau un ex-collègue qui a travaillé avec lui à la Maison-Blanche. Le « ça » ? Une référence aux théories freudiennes sur la partie la plus chaotique de l’appareil psychique, située dans l’inconscient.

« Stephen Miller n’est certainement pas un manipulateur, un hypnotiseur qui dirige tout en coulisses, mais il exerce une influence considérable sur la ligne dure de cette administration, en particulier sur l’immigration, dit en entrevue au Devoir Alexander Reid Ross, spécialiste des mouvements nationalistes et suprémacistes blancs à l’Université d’État de Portland en Oregon. Il semble avoir accumulé suffisamment de pouvoir et d’influence au sein de l’administration pour faire passer son programme rigide tout en restant fidèle au cadre politique de Donald Trump. »

Miller, fils d’une famille aisée de la banlieue chic de Santa Monica en Californie, a d’ailleurs assemblé ce programme avec rigueur, en commençant par devenir agitateur, sur fond de xénophobie, au cœur d’un des collèges de cette ville pourtant très progressiste et inclusive de la côte ouest américaine. Dans sa ligne de mire : ses camarades d’origine hispanique à qui il reproche dans des publications locales de ne pas très bien parler anglais, ce qui force, selon lui, l’établissement à avoir des communications multilingues.

La graine de l’intolérance est là. Elle va germer rapidement au fil de ses contacts avec les milieux ultraconservateurs et nationalistes blancs dont il se rapproche durant ses années au collège, puis à l’Université Duke, où il étudie la science politique. Il y poursuit sa radicalisation au sein du David Horowitz Freedom Center, un groupe de réflexion antimusulman, organisant des événements comme la « Semaine de sensibilisation à l’islamo-fascisme » sur le terrain du campus pour cultiver consciemment la peur de l’autre et mieux appeler par la suite à la mise en œuvre de politiques anti-immigration.

En 2007, avec la complicité de son ami Richard Spencer — une figure forte de l’alt-right, ce mouvement de droite identitaire américain —, il organise une conférence sur le campus mettant en vedette Peter Brimelow, le fondateur du média suprémaciste en ligne VDARE, qui fait la promotion de théories eugénistes et nourrit la haine des immigrants.

L’année suivante, Stephen Miller entre en politique sur la scène fédérale comme attaché de presse de l’ex-députée du Minnesota Michele Bachmann, porte-voix du complotisme antimusulman à Washington. C’est elle qui a affirmé, en contradiction avec les faits, que les Frères musulmans avaient infiltré le gouvernement américain dans le but de « détruire les États-Unis ». Il travaillera ensuite aux communications du sénateur de l’Alabama Jeff Sessions, autre proche de groupes haineux anti-immigration.


Fabien Deglise


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