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Culture

Côte d'Ivoire. 30 000 festivaliers autour du balafon à Boundiali (interview avec Koné Dodo)

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La 9e édition du Djéguelé festival s'est tenue du 5 au 12 avril 2025 à Boundiali, au Nord de la Côte d'Ivoire. Dans cet entretien, Koné Dodo, directeur dudit festival, par ailleurs directeur général du Palais de la culture d'Abidjan, en dresse un bilan, tout en insistant sur son importance pour la promotion de la culture sénoufo en général et pour le département de Boundiali en particulier.

Comment est né le Djéguelé festival ?

Le Djéguelé festival est parti d'une idée du ministre de la Culture Bandaman Maurice et de l’Organisation des Nations unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO). Le balafon, appelé djéguelé en sénoufo a été inscrit sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l’UNESCO en 2012. Et c'est le Burkina, le Mali et la Côte d’Ivoire qui en ont fait la demande, pour la simple raison que ce sont ces trois pays qui ont le balafon en partage. Au Sud du Mali et du Burkina et au Nord de la Côte d’Ivoire, ce sont les Sénoufo qui ont en partage le balafon. C’est un instrument fondamental pour le peuple sénoufo, un instrument de référence. En son temps, l’UNESCO avait demandé à chacun des trois pays de faire un festival pour faire la promotion de cet instrument. A la demande de Bandaman Maurice, nous avons commencé en 2016. Nous continuons à le faire. Notre festival se développe d’année en année.

Quel bilan pouvez-vous tirer de l’édition 2025 ?

Je suis heureux pour ce qui est arrivé cette année au festival. La dernière nuit, le 12 avril 2025, il y a eu près de 30 000 festivaliers. Les choses vont en évoluant positivement. Le festival est monté d’un cran. Tout le monde m’a félicité pour la communication qui a entouré le festival. Comme lors des campagnes précédentes, TV 5 nous a fait une très bonne campagne, RFI également. Et puis nous avons une équipe composée d’une trentaine de journalistes qui travaillent avec nous depuis plusieurs années, qui ont communiqué de façon conséquente sur le festival. La page Facebook du festival a enregistré 600 000 vues en trois semaines. Ce n’est pas rien. On n’avait jamais fait ça. La conférence s’est bien passée. Le conférencier était Koné Ibrahim de l’Université Peleforo Gbon de Korhogo. Il a eu à entretenir le public sur le lien entre le numérique et le balafon.

En quoi le numérique peut aider le balafon à aller plus loin ?

Le numérique est quelque chose de formidable. D’un petit village de la Côte d’Ivoire, le numérique peut faire connaître cette danse aux Etats-Unis ou ailleurs. Il fallait qu’on leur apprenne l’utilité de cet instrument moderne de façon efficiente.

Il y a eu aussi le concours de balafon mixte de la région de la Bagoué. Douze groupes ont compétit . Le vainqueur a eu droit à un tricycle. Il y a eu la soirée Jazz. Une jeune dame venue du Burkina Faso nous a fait une soirée de balafon-Jazz. Parce que le balafon peut accompagner plusieurs genres musicaux. Le Blues et le Jazz que vous voyez aux États-Unis, ce sont des gens qui sont partis d’Afrique dont certains jouaient au balafon. Cette année il fallait le Jazz et le balafon pour montrer que nos ancêtres le faisaient. Et que les américains ont emporté le balafon là-bas et ils continuent de l’utiliser. On a les pays comme le Mexique qui ont encore le balafon. Les esclaves sont allés avec le balafon. Ils continuent de le jouer. Comme bien d’autres pays d’Afrique.

Confectionnent-ils le balafon avec le même matériel que nous en Côte d’Ivoire ?

Non pas forcément avec du bois d’ébène. Certains le font avec du bois, d’autres avec du matériel qui donne un son un peu plus clinquant. Nous sommes entrain de voir si nous avons les moyens de les inviter l’année prochaine. Ils ont envie de venir pour montrer à l’Afrique qu’ils n’ont pas oublié les us et coutumes. Les trois derniers jours du festival, il y a eu du Live. Il y avait des artistes de grands talents. Il y a eu un groupe d’Odienné qui joue du balafon avec tous les instruments : Balafon, percution, batterie. C'est dire que le balafon peut aller très loin. On a intérêt à l’utiliser. De plus en plus les artistes l’utilisent. Chaque année, le Mali, le Burkina Faso viennent ensemble au festival. Le balafon est fédérateur. Les hommes de culture veulent fédérer. Il veulent rapprocher les peuples. Et c’est ce que nous faisons à Boundiali.

Quelles ont été les innovations de cette édition 2025 ?

Je répond toujours aux gens que je n’ai pas d’innovations. Je le fais très rarement. Quand vous construisez votre maison, vous faites une bonne fondation. Vous construisez la maison. Mais chaque jour vous n’allez pas innover, casser un coin. Nous posons les fondements de la Fondation du Djéguelé festival. Nous la consolidons au fur et à mesure. Quand nous avons commencé, nous n’avions que la RTI qui en parlait. On a vu que ça fonctionnait. Les sponsors viennent progressivement. Les médias internationaux nous accompagnent. Ils font la campagne pour un large public. Et ça c’est important. Si on veut parler d’innovation il ya RFI qui a commencé à nous suivre cette année. C’est un développement du volet communication que nous apprécions. Pour les conférences, les thèmes changent chaque année. Je n’appelle pas cela une innovation. Nous améliorons notre instrument qu’est le Djeguele. C’est l’un des meilleurs festivals de Côte d’Ivoire.

Au bout de neuf éditions, peut on affirmer que votre festival est bien connu dans les sphères culturelles internationales ?

Aujourd’hui on connaît le Djeguele en France, aux États-Unis, un peu partout. Nous en sommes fiers. Tout comme la ministre Mariatou Koné, nous aimons Boundiali. Nous aimons notre région. Nous nous battons pour la développer. Je me bas en tant que conseiller municipal chargé de la culture et le tourisme, pour qu’elle s’intéresse davantage au tourisme. Quand elle nous a demandé ce qu’il faut faire pour encourager le Djeguele festival, j’ai proposé la construction du Palais de la culture de Boundiali. Ce Palais est quasiment terminé. Pourquoi tout faire à Abidjan ? Démontrons que nous pouvons faire des choses intéressantes à l’intérieur. Quand nous voulions commencer le Djeguele festival à Boundiali, on nous disait : qui va venir voir ? Il y a combien d’habitants à Boundiali ? Maintenant ils sont surpris que, pendant le festival, nous avons plus de 50 000 personnes. Boundiali est maintenant peuplée. Les gens viennent de tout le département, même de Korhogo. Les gens viennent également des pays voisins avec des troupes.

Quelles sont les retombées économiques du Djéguelé festival ?

Sur le plan économique, les restaurateurs sont très heureux, les hôteliers, les fabricants d’objets d’art, les productrices du beurre de karité également. Pour l’économie locale, je pense que ce n’est pas mauvais. Nous, peuple sénoufo, sommes fiers de notre culture. Et le balafon est un instrument important pour le Sénoufo. A la naissance d’un bébé, on joue au balafon parce qu’on est heureux d’avoir eu un enfant. Quand il y a un mariage, vous entendez le son du balafon. On envoie les balafonistes au champ pour encourager les gens à labourer. Et quand il y a un décès malheureusement, il y a encore le balafon. C’est un compagnon de tous les jours. Donc il nous appartient de l’entretenir. Et dans le même temps, de songer à planter le bois d’ébène. C’est ce bois qui est utilisé pour fabriquer le balafon. Il nous appartient chaque année d’aider les villageois à planter le bois d’ébène, à l’entretenir.

Avez-vous un projet dans ce sens ?

Oui. Nous le faisons depuis quelques années, sans bruit. Depuis 2017, lors de la deuxième édition du Djeguele Festival, nous avons commencé à aider les populations à planter le bois d’ébène .

Peut-on dire que le Djeguele festival apporte beaucoup aux populations sur le plan culturel ?

Oui. Sur le plan du rapprochement des peuples, de l’intégration des peuples également. Les gens viennent du Mali et du Burkina. On les accueille à bras ouverts. Ils sont tous heureux d’être à Boundiali en Côte d’Ivoire.

Les travaux du Palais de la Culture de Boundiali vont bientôt s’achever. A partir de quand va-t-il abriter l’organisation du Djeguele festival ?

La 10e édition du Djéguelé festival se fera au Palais de la culture de Boundiali en 2026. C’est le souhait de Mariatou Koné, députée-maire de Boundiali. Il appartient à toute la presse de porter le Palais de la culture de Boundiali, le Djeguele festival pour que le monde entier sache qu’il y a une ville en Côte d’Ivoire qui est culturelle et une ville qui par la culture attire du monde pour le tourisme. Parce que la culture c’est le substrat du tourisme. Sans culture, il n’y a pas de tourisme. Quand ils viendront, ils verront le Palais de la culture, le bois sacré, la poterie, etc. Il y a beaucoup de choses qui sont culturelles. La plus vieille case de Kolia par exemple qui existe depuis des siècles. Il y a des choses comme pareilles qui sont importantes. Ils nous appartient de, par le festival, d'amener beaucoup plus de monde dans notre région de la Bagoué. Nous espérons que les cadres de la Bagoué nous aideront, comme Mariatou Koné le fait.

Propos recueillis par Diomandé Karamoko




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