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Péages. : ma lettre ouverte au Premier ministre Patrick Achi

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Excellence Monsieur le Premier Ministre,

Je voudrais me permettre de m’adresser à vous pour la première fois, ce jour, pour la première fois également que je me décide d’écrire une lettre ouverte, et peut-être la dernière fois si tout va bien dans notre pays, sinon la première d’une série de fois tant que nos populations se sentiront désabusées, tant qu’il y aura des voix inaudibles qui auront besoin d’appui, si modeste serait-il, pour s’amplifier.

Excellence Monsieur le Premier ministre, initialement cette première lettre ne vous était pas destinée. Elle était plutôt adressée à notre ministre de l’Équipement et de l’Entretien routier, qui vous a succédé à la tête de l’ex-ministère des Infrastructures économiques.

Mais, j’ai fini par me résigner à vous l’adresser dès que j’ai suivi au JT de 20h du mercredi 30 juin 2022 que le ministre, par ailleurs député élu de la circonscription de Divo, sera face à ses homologues députés dans les jours à venir pour expliquer sa politique d’équipement et d’entretien de nos routes.

En attendant, je voudrais vous partager ces préoccupations, en tant que Chef du Gouvernement, qui autorisez et assumez pleinement les actes de vos collaborateurs. J’ai suivi, comme la plupart de vos citoyens, les sorties de certains de vos collaborateurs, en l’occurrence le ministre du Commerce et son homologue de la Solidarité, qui pour convaincre l’opinion des énormes sacrifices consentis pour amortir le choc de l’inflation toujours galopante depuis des mois, qui pour lancer à la face du monde que le taux de pauvreté a reculé de 59 à 39% en quelques petites années. Tout ceci, pour répondre au murmures et gémissements, à ces voix qui montent, et dont les échos vous parviennent certainement.

Monsieur le Premier ministre, je ne me serais pas voulu m’ajouter à toutes ces clameurs et cris de chagrins et de frustrations, si ces murmures si sonores avaient suscité de l’émotion, en lieu et place de ce qui passe pour être un mépris ou de l’arrogance en écoutant bien de vos collaborateurs et en suivant certains de leurs actes sur les antennes de notre télévision nationale. La télévision que nous payons, bien entendu, dans un système libéral qui devrait donner la liberté du choix au consommateur.

Après l’épisode de votre détour dans un ‘’Garbadrome’’ en février, dont je n’ai dit mot par dépit, je veux parler spécifiquement des péages sur nos routes et spécifiquement de celui de l’autoroute de Grand-Bassam’’ aujourd’hui.

4,8 milliards ou 23 milliards ?

Monsieur le Chef du Gouvernement, la question du coût du péage fait encore l’objet d’une polémique interpellative à laquelle notre ministre en charge du projet n’a pas daigné donner suite jusqu’à présent. Du mépris ? De la condescendance ? En tout cas, le peuple a besoin de savoir, et le peuple a ce droit de savoir.

En effet, alors qu’il faisait une visite sur le terrain, le 15 janvier 2021, notre ministre a laissé entendre que le coût du péage était de 4,8 milliards de f Cfa entièrement financé par le Fonds d’Entretien Routier (FER), donc par le contribuable ivoirien. (https://www.fratmat.info/.../autoroute-de-grand-bassam-le...)

Douze mois après, le même ministre, sur le chantier en finition, brandit un nouveau coût. La construction du péage est passée subitement de 4,8 à 23 milliards de f Cfa, soit près de 500% du coût initial.

Comment cela peut-il s’expliquer, ce gap de plus de 18 milliards (presque 4 fois le budget initial) en seulement une année d’exécution des travaux ? Quels sont les ingénieurs qui ont effectué les études préalables pour définir les coûts de réalisation pour qu’ils varient soudainement et de façon aussi arithmétique au détriment des caisses de l’Etat ?

Comment la rallonge du budget d’un ouvrage peut-elle dépasser le budget initial ? Quel imprévu majeur y a-t-il eu sur ce chantier pour justifier cette rallonge subséquente ? Je m’interroge, Monsieur le Premier ministre, et comme bien d’observateurs nationaux, nous voulons savoir.

Nous demeurons dans l’expectative que notre ministre nous convaincra sur ce sujet face aux élus de la nation lors de son passage que nous suivrons attentivement.

Coût du péage à 1000 f

Monsieur le Premier ministre, il y a eu assez de littérature, en une semaine, sur le coût fixé pour ce péage. En principe, je ne devrais plus avoir à redire. Car, après les explications de vos services, nous avons compris que cette autoroute est un morceau de la grande autoroute à péage Abidjan – Lagos. Donc, elle ne devrait pas avoir le même coût que les autres. Soit.

Mais, Monsieur le Premier ministre, il faut convenir que ce montant revient cher, non pas seulement aux usagers, mais aux pauvres populations pour lesquelles vous semblez vous battre pour améliorer le quotidien. Combien de camions faisant le trafic international empruntent cette voie pour que l’on fixe le tarif en tenant compte d’eux ? Je suppose que là aussi, nos ingénieurs avisés ont fait de bonnes études pour conseiller le tarif fixé.

Seulement, laissez-moi vous dire qu’aussitôt ce tarif appliqué, le coût du transport a pris son envol. Le trajet Abidjan-Bassam est passé de 500f à 700f, Abidjan – Bonoua de 600 f à 800 F, Abidjan – Aboisso, etc. Les transporteurs se frottent les mains, les pauvres populations ne retrouvent plus la queue du diable pour tenter de s’y accrocher, en cette période d’inflation généralisée.

Votre gouvernement a-t-il pensé au pauvre ouvrier, à la pauvre commerçante, au pauvre étudiant dont les parents se battent, ces employés, qui peinent à tenir leurs ménages, …, qui subissent le coût de cette augmentation en tant que passagers ? Quid des nombreux travailleurs qui ont choisi de vivre à Grand-Bassam, à Yaou, à Bonoua, voire à Aboisso pour rallier Abidjan chaque matin et repartir chaque soir ? Et tous ces autres usagers qui, s’étant débrouillé pour s’acheter un véhicule, vont travailler d’Abidjan à Grand-Bassam chaque jour ? Il leur faudra débourser au quotidien 2000 f, soir 48.000 F / mois pour rejoindre leurs postes. Où devront-ils tirer ce montant sans augmentation sur leurs salaires ?

Monsieur le Premier ministre, je voudrais signale, à titre de rappel, que le litre de carburant a augmenté de près de 20% en seulement quelques mois. Voyez le poids de la misère que tous ces facteurs conjugués imposent à vos frères et sœurs dont la grâce divine vous a donnés d’être les bergers, vous et votre gouvernement !!!

Va-t-on fermer l’ancienne voie ?

Excellence, Monsieur le Premier ministre, en plus de tout ce que je viens de décrire, des bruits courent qui font dire que l’ancienne route de Grand-Bassam va être fermée. Ceci, pour obliger les usagers à passer par l’autoroute et à payer le pont. Franchement, je considère que ce sont des ragots qui ne méritent pas que j’étende ma lettre. Surtout que nous sommes dans un régime libéral qui donne la liberté de choix aux consommateurs. En plus, je me souviens bien, lors de la première pioche du péage quand l’ancien Premier ministre, Daniel Kablan Duncan, avait annoncé la rénovation de cette ancienne route – ce qui a été fait- afin de donner le choix aux usagers qui ne voudraient pas passer par l’autoroute, de l’emprunter. Mieux, j’ai aussi en mémoire cette phrase : « Nous devons permettre aux habitants des quartiers attenants à l’autoroute aussi bien à droite qu’à gauche, d’accéder facilement et en toute quiétude à leurs domiciles. Nous étudions donc la possibilité de faire plusieurs autres voies afin de le leur éviter d'être dans l’obligation de payer le péage », dixit Amedé Kouakou, actuel ministre de tutelle. (https://www.fratmat.info/.../autoroute-de-grand-bassam-le...).

Ces rappels de promesses, je suppose, mettent fin à certaines rumeurs qui circulent.

Les péages vont-ils remplacer l’industrialisation ?

Cette fois, ce ne sont pas des rumeurs. Dans ses projections, le ministère de l’Équipement et de l’Entretien routier envisage la construction de nombreux autres péages à travers le pays. Une bonne douzaine d’autres sur nos routes, et cela m’interpelle.

Monsieur le Premier ministre, la Côte d’Ivoire, sous la gouvernance du Président de la République Alassane Ouattara, affiche de grande ambition en matière d’industrialisation et de transformation de nos matières premières pour booster son développement. Les postes à péages vont-ils remplacer ces industries attendues ? Car, alors qu’on attend de l’Etat d’investir dans la construction d’usine pour transformer le manioc, la mangue, la banane, qui pourrissent à profusion dans les champs, ce sont les péages qui sortent de terre et accentuent la pression fiscale sur les populations. La route devient-elle la matière première du gouvernement ? La route va-t-elle être érigée en source de revenue ? Les infrastructures telles que les routes sont-elles faites pour asservir les populations ? L’adage ne dit-il pas que la route précède le développement ? Dans le cas d’espèce, la route payante n’en rajoute-t-elle pas à l’inflation ? N’enfreint-elle pas au bien-être que traduit le développement ?

A propos de l’entretien de nos routes, et le goudron que nous produisons….

Pour justifier ces péages, le ministère évoque les moyens pour l’entretien de nos routes. Alors, je voudrais savoir : s’il est vrai que nous sommes un pays producteur de pétrole (modestement soit-il), et que nous disposons d’une raffinerie d’où sortent les produits pétroliers que nous consommons, que devient le résidu des processus de liquéfactions dans cette industrie ? N’est-ce pas ce résidu que l’on appelle le goudron ? Ne sommes-nous pas donc producteur du goudron que nous utilisons pour les bitumages ? Pourquoi devrait-on souffrir pour la création et l’entretien de nos routes ? Ceci n’explique-t-il pas que la Côte d’Ivoire dispose de l’un des meilleurs réseaux routiers de la sous-région ?

Je voudrais terminer sur ces mots par un plaidoyer.

Monsieur le Premier ministre, la vie est chère en Côte d’Ivoire. Plus personne ne résiste à l’étouffer sous la gorge au risque de se donner du goitre. Vous avez sans doute eu écho du cri du cœur de l’artiste qui n’a pu se retenir sur le podium de ‘’Miss Côte d’Ivoire 2022’’. C’est l’expression d’un ras-le-bol à ne pas négliger. Les salaires n’augmentent pas, mais les charges s’accroissent chaque jour, chaque semaine et chaque mois. Rien ne va pas à la base. La famine sévit dans plusieurs foyers dans les quartiers et villages. Mais, on a l’impression que du haut, au sommet, ces réalités ne se perçoivent pas. Les beaux chiffres que vous manipulez semblent très en déphasage avec la réalité et le vécu de vos populations.

Il faut les écouter. C’est votre devoir, et je ne vous apprends rien, de répondre à leurs préoccupations. Comme c’est le cas des péages qui en rajoutent à leurs souffrances. Les routes doivent favoriser la circulation des personnes et des biens pour booster le développement, et non freiner ces mouvements qui traduisent le dynamisme dans un pays. On peut comprendre un opérateur qui établit des mécanisme pour se faire rembourser le prix d’un ouvrage réalisé à ses frais (Pont HKB), mais, est-ce le cas pour ces péages sur les routes de l’Est, l’autoroute du Nord, …, financées par le contribuable ivoirien.

Enfin, Monsieur le Premier ministre, où en sommes-nous avec la réduction du train de vie de l’Etat ? Le projet se serait-il arrêté juste à l’éviction du gouvernement de quelques portefeuilles de Secrétaires d’Etat ? En tout cas, il me semble que ceci n’a rien changé…

Felix Diby Bony




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