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L’Enquête du jeudi . Côte d'Ivoire. Treichville - Rue 12 : le nouveau plan de circulation tue le commerce

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Depuis le jeudi 14 octobre 2021, un nouveau plan de circulation est en vigueur dans la commune de Treichville. Il est l’œuvre de l'Autorité de la Mobilité urbaine dans le grand Abidjan (AMUGA). Les automobilistes qui ont emprunté les voies routières de cette commune depuis lors, particuliement ceux qui sont passés par la légendaire « Rue 12 » ont dû constater que la circulation ne se fait plus dans les deux sens. Le sens opposé à celui où la circulation est autorisée, est réservé uniquement aux autobus de la Société des transports abidjanais (SOTRA).

La circulation est certes devenue fluide sur la « Rue 12 », que l’on peut considérer à juste titre comme la vitrine de la commune. Sauf que plusieurs commerçants affirment mordicus être lésés par ce nouveau plan de circulation. Ils estiment que leurs activités ont été sacrifiées sur l’autel de la fluidité de la circulation routière.


En témoigne Yassine Boulvi, commerçant d’appareils électro-ménagers et divers autres objets. Il tient un magasin sur cette rue. Ses activités sont touchées de plein fouet, du fait de l’emplacement de son magasin du côté où il y a le sens interdit. Du coup, il ne reçoit plus de clients comme par le passé. Ceux qui s’aventurent à aller faire des emplettes chez lui sont verbalisés par les agents de la police SOTRA parce qu’ils empruntent la voie des autobus pour se rendre dans son magasin. Conséquences : 43 jours après la mise en action du nouveau plan de circulation, la moitié de ses clients lui ont tourné le dos. Il se demande ce qu’il en sera d’ici la mi-janvier 2022. Pourtant, Yassine fait remarquer que par le passé la période proche des fêtes de fin d’années, est la plus propice de l’année pour faire recette. « Il y avait plusieurs véhicules qui passaient par la rue. Elle était bondée de véhicules, mais depuis lors on peut rester 2 secondes sans voir passé un seul véhicule ». Une chose qu’il a du mal à comprendre. Il n’avait jamais imaginé que la rue se retrouverait un jour dans cet état. C’est-à-dire, une rue qui se meurt chaque jour un peu plus. Une rue qui a tout perdu de son dynamisme et de l’ambiance quotidienne qui y régnaient autrefois. Et qui ont pendant longtemps attiré des touristes internationaux venus découvrir et vivre surtout dans cette atmosphère festive quotidienne.

Tout aussi irrité par le nouveau plan de circulation, Ali, un commerçant originaire du Magrheb utilise une expression propre au langage populaire ivoirien pour décrire la situation. « C’est gâté », dira-t-il pour signifier que les affaires sont plus que catastrophiques. Et cela ne concerne pas selon Ali uniquement les commerçants situés au versant opposé de la voie sur laquelle la circulation est autorisée, mais bien eux tous. « Nous sommes tous découragés. Nous avons du mal à faire face aux effets de la Covid-19 que survient cette situation, qui nous fait plonger dans une situation plus calamiteuse ».

Conscient de cet état de fait somme toute désastreux, Réda, le gérant du magasin N. Technologies, commence par se questionner : « on va faire comment ? ». Avant de lâcher quelques secondes plus tard « Nous sommes obligés de faire avec, de nous adapter. Nous n’avons pas le choix ».

Pour s’adapter, certains de ces commerçants sont amenés à se disputer les clients, qui arrivent sur place. Sur le coup de 12 heures 31 minutes, deux employés de deux magasins situés en face de Synix, se sont précipités sur un véhicule de type tout terrain, dont les occupants venaient à peine de mettre pied à terre. Quelques minutes plus tard, ayant aperçu une dame qui cherchait à stationner son véhicule, les mêmes employés se sont rendus en hâte vers cette dernière. Ils l’ont tous deux aidé à stationner son véhicule. « Bonjour Mme, vous pouvez entrer dans notre magasin. Venez voir… », disent-ils pratiquement ensemble. Malheureusement, elle a décliné les offres car elle n’était pas venue faire des achats, mais plutôt une autre course. Elle s’excuse et s’éloigne aussitôt.

Notre passage sur cette rue le lundi 29 novembre, nous a aussi donné de constater un fait qui explique la grogne des commerçants. Ceux qui viennent livrer les marchandises aux magasins situés du côté où la voie est réservée aux autobus de la Sotra, n’ont d’autres choix que de stationner en sens interdit. De sorte que quelques fois, les autobus circulant en sens inverse sont contraints de passer sur la bande blanche, au risque de provoquer des accrochages. A quelques pas de là, est stationné un véhicule de la Sotra à bord duquel se trouvent des agents de police. Certains d’entre eux sont postés non loin dudit véhicule. Ils verbalisent la plupart des automobilistes qui s’aventurent à emprunter la voie réservée aux autobus. Selon des commerçants, qui se sont plaints aux autorités municipales, la contravention s’élève à 22 000 FCFA.

Ne sachant où donner de la tête, Ali s’en remet à Allah. Quant à Yassine, il fait un clin d’œil aux autorités. « Nous implorons la clémence des autorités, afin qu’elles rétablissent la rue dans son ancienne configuration car nous souffrons ».

Des démarches ont par ailleurs été entreprises à ce sujet par des commerçants auprès des autorités communales selon une information émanant de Buadou Jacques, le responsable du service de la communication de la mairie de Treichville. Au nombre de ces commerçants figure le dénommé Wazani, le président des commerçants marocains. Nous l’avons rencontré dans la matinée du lundi 29 novembre. Assis derrière le comptoir de son magasin où sont vendus des tapis de prière, des boubous, des chaussures et autres, il nous apprend qu’ils sont allés effectivement négocier, pour que la Rue 12 garde sa circulation dans les deux sens. Très avare en paroles, le commerçant ajoute qu’il attend la suite des négociations avant de faire une quelconque déclaration, sans plus. « J’espère que vous comprenez le fond de ma pensée », affirmera-t-il avant de se murer dans le silence.


Le passage des taxis communaux dans les ruelles inquiète

Les habitants du quartier qui abrite cette rue légendaire, à l’instar des commerçants, disent ressentir également les effets indésirables de ce nouveau plan de circulation. La plus grande crainte est exprimée par Mme Zahoui, une commerçante, résidant dans le quartier. « Depuis que le plan de circulation a changé, nous les mères de familles sommes inquiètes. Tous les taxis communaux qui empruntaient la voie principale, entrent dans les ruelles du quartier pour se déplacer. Ceci constitue un réel danger pour nos enfants parce que la plupart du temps, ils jouent dans les ruelles. Un accident est vite arrivé. L’association des femmes du quartier a commencé à mener une campagne de sensibilisation à l’endroit des femmes, afin de demander de prévenir leurs enfants au sujet de la menace qui plane sur eux, quant à la circulation des taxis communaux », affirme cette résidente. Certains habitants ont élevé des dos d’âne ici et là, sur ces ruelles des quartiers, juste au niveau de leurs habitations. Un autre fait aura pour conséquence de créer des embouteillages sur ces voies.

Sous le couvert de l’anonymat, un autre relève que plusieurs des personnes venues faire des courses à la Rue 12, ont choisi de stationner leurs véhicules dans les ruelles du quartier. Ce qui, du reste contribue à les encombrer et engorge la circulation. Au point où les résidents du quartier possesseurs de véhicules éprouvent très souvent mille et une difficultés pour sortir avec leurs voitures. En plus, les coups de klaxon émis par les taxis communaux pour appeler les clients, sont devenus insupportables pour plusieurs habitants des lieux. Une pollution sonore, qui perturbe le sommeil et le repos des habitants et provoque des traumatismes psychologiques chez d’autres.

Interrogé, Buadu Jacques, fait noter que le projet ne relève pas de la mairie, mais plutôt de l'Amuga. Cette structure est située aux Deux Plateaux à environ 220 mètres derrière le restaurant BMW. L’après-midi du mardi 30 novembre, un agent avec qui nous avons échangé, a laissé entendre que le nouveau plan de circulation de la « Rue 12 » est une volonté du gouvernement. Et que par conséquent, l’AMUGA ne peut rien pour modifier ce qui a été décidé par les autorités gouvernementales. Par contre, il demande de joindre le call center au 1302 pour signaler des préoccupations. Ce que nous avons fait pendant une trentaine de minutes, sans parvenir à avoir un interlocuteur au bout du fil, sauf le message inscrit dans la boite vocale, qui passe en boucle.

Une dame, exerçant dans la même structure, indique que toute remarque peut être signalée au directeur général par courrier.

Maintenir le plan de circulation en l’état équivaut à une mort certaine de la « Rue 12 », et avec elle, celle de la fermeture programmée de plusieurs magasins. Que fera le gouvernement ? Tenir compte des préoccupations exprimées par les commerçants et autres, ou maintenir les choses en l’état sans oublier les conséquences qu’elles pourraient engendrer ?


Junior Jeremy






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