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Politique

Démocrafika

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L’emprisonnement hier d’Olga Ramalason, ancienne maire d’Antsirabe et ancienne ministre sous les couleurs du parti de Marc Ravalomanana, est le dernier épisode en date d’une route agitée vers les élections législatives. Motifs avancés : des affaires foncières remontant à 2009, du temps où elle était à la tête de la municipalité d’Antsirabe. Dans plusieurs localités, les candidats de l’opposition aux législatives se retrouvent face à divers ennuis, dont judiciaires, pour diverses raisons plus ou moins fallacieuses. Celles-ci autorisent les soupçons quant à des manœuvres ayant un seul objectif : empêcher ces opposants de conquérir des sièges à l’Assemblée nationale. L’enjeu est de taille pour le pouvoir en place : il s’agit de brider à n’importe quel prix et par tous les moyens le potentiel de l’opposition à contrôler la chambre basse du Parlement, car cela risquerait d’ouvrir un boulevard à des scénarios embarrassants pour l’Exécutif pouvant aller jusqu’à des motions de censure ou d’empêchement.

Nous n’allons pas tourner autour du pot. Selon tous les indicateurs faisant foi (Freedom House, Economist Intelligence Unit, projet V-Dem de l’Université de Gottenburg en Suède, Reporters sans Frontières etc.), Madagascar n’a jamais été une démocratie depuis 1960 jusqu’à ce jour. Il y a certes eu des moments meilleurs que d’autres, comme sous la Présidence du Professeur Zafy, tout comme il y a eu des moments pires que d’autres, comme sous les première et deuxième république, ou sous la Transition 2009-2013. Le graphique en bas d’article montre clairement les deux périodes « noires » durant lesquelles Madagascar plonge en dessous de 0,2 sur un indicateur allant de 0 à 1 : 1960-1992, et 2009-2013. Ce sont d’ailleurs les deux périodes de l’Histoire où le pays fait pire que le Rwanda. À titre de comparaison, la courbe du Botswana, une des démocraties les plus stables d’Afrique, ainsi que celle du Sénégal, ont été rajoutées. Seuls ceux qui sont assis sur leur sens critique vont soutenir qu’Andry Rajoelina est un champion de la démocratie, sous prétexte qu’il a inauguré la place éponyme, par ailleurs à usage unique comme les Kleenex.

Comme prévu, les faits et les chiffres attestent des dérives autocratiques d’Andry Rajoelina depuis sa réélection pour un second mandat. Mais finalement, quoi de plus normal de la part d’un auteur de coup d’État, dont les niveaux d’éducation et de culture politique n’ont pas permis une préparation suffisante au respect de la morale et des règles constitutionnelles. Andry Rajoelina est donc un chef d’État entièrement « à l’Africaine », mais à l’Africaine dans le style sixties. En effet, l’Afrique offre aussi depuis des décennies quelques bons exemples de démocrates respectueux des valeurs démocratiques et surtout de la Constitution de leur pays. Malheureusement, le patron de l’Exécutif s’inspire plus du style de personnalités comme Robert Mugabe, Paul Kagame, Faure Gnassingbé ou Denis Sassou-Nguesso : l’essentiel est de trouver les moyens de protéger le pouvoir pour s’y accrocher. Peu importe la manière, c’est le résultat qui compte. « On n’organise pas des élections pour les perdre » aurait dit l’ancien chef d’État congolais Pascal Lissouba. Il reste juste à espérer que l’inspiration n’ira pas jusqu’à Bokassa.

Mise au pas des administrations publiques, intimidation des leaders de la société civile, arrestations d’opposants ou de lanceurs d’alerte, manipulation du système électoral, demande de rappel d’un ambassadeur trop franc dans ses critiques, et depuis quelques semaines, intensification des manœuvres pour empêcher les opposants de mettre leur candidature en oeuvre : tracasseries administratives dans la finalisation de leurs dossiers, intimidation sous des formes diverses, arrestations. L’idée du pouvoir est de configurer le paysage en amont, pour qu’en aval les résultats électoraux aient l’air propres, une fois que la compétition ait été débarrassée des candidats dangereux.

Finalement, les législatives seront à l’image de la dernière présidentielle : un jeu électoral dès le départ biaisé pour assurer l’élection des candidatures d’État, prétendu sans tâche et sans reproches par le pouvoir en place, adoubé par une Haute cour constitutionnelle soi-disant indépendante, et consenti par une communauté internationale à la lucidité douteuse, malgré le message clair du silence éloquent des abstentionnistes.

Au fait, puisque la Justice malgache fait acte de zèle et de mémoire en s’intéressant aux dossiers remontant à 2009 comme dans le cas de Madame Ramalason, on se demande avec curiosité ce qu’elle va faire au sujet des actes de coup d’État, de mutineries, de vandalisme et de destruction de biens publics qui ont eu lieu cette année-là.

Ndimby A., Patrick A.





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