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Societe

Mon indignation n’est pas une émotion........nègre !

Publié le :

Dr Oumou Dosso

En réponse à l’éditorial de Venance Konan intitulé « Émotions nègres »
Le virus branchu, manifestement, met à la lumière du jour ce que nous sommes. Quand il ne grippe pas les corps, il infecte les têtes. Ainsi, dans la ferveur générale pour trouver un remède au Covid-19, deux bien-pensants et sachants, nous ont fait l’honneur, à nous Africains, de nous informer que l’Afrique devrait être ‘’choisie’’ comme champ d’expérimentation d’un vaccin anti-tuberculeux BCG contre le Covid-19. Motif ? Parce qu’elle n’a « pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation, un peu comme c’est fait d’ailleurs certaines études sur le sida, où chez des prostituées on essaie des choses parce qu’on sait qu’elles sont hautement exposées, et qu’elles ne se protègent pas ». Sur un ton léger, limite badin, le Prof. Jean-Paul Mira, chef du service de réanimation de l’hôpital Cochin le suggère à son compère le Prof. Camille Locht, directeur de recherches à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et à l’institut Pasteur de Lille. Lequel acquiesce par un «vous avez raison, on est d’ailleurs en train de réfléchir à une étude en parallèle en Afrique ».
 
Que deux paumés ou deux manants, astreints à un confinement strict, cancanent ce genre de propos associant Afrique-misère-sida-prostituée dans une même phrase, cela m’aurait laissée, par temps de coronavirus, à 37. Mais que des médecins, mieux des professeurs en médecine, disciples supposés d’Hippocrate devant Dieu et les hommes, se gargarisent à l‘antenne en nous présentant un rayon de leur abyssale science, cela me choque et mon indignation n’est pas une émotion...nègre.
Mira et Loch ne sont pas des lampistes, loin s’en faut, pour que nous fassions passer par pertes et profits leur oubli de cette séquence du célèbre serment :
« Dans quelque maison que j'entre, j'y entrerai pour l'utilité des malades, me préservant de tout méfait volontaire et corrupteur ».
 
 Je m’indigne, non par ‘’l’émotion’’ estampillée comme nègre par le poète Senghor ; je m’indigne parce que les deux Géotrouvetou ne se sont même pas rendu compte, dans leur petite causerie, qu’ils nous ont dit clairement ceci : les protocoles de déontologie de la recherche médicale prohibant l’usage de pratiques discriminatoires ne doivent s’appliquer qu’en Europe, pas dans le désert sanitaire qu’est l’Afrique, terre de cobayes ! Je m’indigne, non de l’éventualité qu’un vaccin puisse être expérimenté en Afrique mais plutôt de la (bonne) intention - dont on dit qu’elle pave le chemin de l’enfer- qui présidera l’essai de ce vaccin. Vu les images de fin de monde que nous montrent les médias européens (morts en cascade, hôpitaux surpeuplés, manque d’appareils respiratoires et même de masques, confinement total, etc.), je suis en droit de douter de l’esprit philanthropique du projet des Monseigneurs. On se souvient sur le continent des essais cliniques illégaux contre la méningite et ceux du Tenofovir contre le sida au Nigeria et suspendus en raison de délits éthiques. 
 
Le dire bruyamment ce n’est ni être d’une susceptibilité à fleur de peau ni réfuter le manque de moyens auquel nos chercheurs africains sont confrontés. Du reste, la recherche scientifique n’est pas que médicale. Des progrès, par exemple, ont été réalisés en Côte d’Ivoire grâce au Centre national de recherche agronomique (Cnra), centre d’excellence dans ce domaine qui fait notre fierté par l’impact des résultats de la recherche sur le développement socioéconomique de notre pays.
(igname, manioc, banane plantain, etc.).
Le “Cacao Mercedes” du Cnra fait la a sécurité alimentaire ivoirienne est majoritairement assurée grâce aux trouvailles du Cnra l'essentiel de l'économie cacaoyère ivoirienne.
 
Nos chercheurs et inventeurs sont loin d’être en panne d’ingéniosité, c’est le fonds qui manque le plus. Et vivement que la pandémie du Covid-19 fasse comprendre à nos gouvernants qu’il est grand temps de donner les moyens à nos chercheurs qui trouvent.
 
Cela nous éviterait la fuite des cerveaux qui contribuent à trouver des vaccins contre les pandémies dans les instituts de recherches européens, américains et asiatiques, et par ricochet les sornettes d’experts ès balivernes.
 
La plupart des pays africains n’ont pas matérialisé leurs engagements politiques en programmes susceptibles d’impulser le développement par la science. L’Afrique subsaharienne contribue pour environ 2,3 % au produit intérieur brut au niveau mondial, mais ne dépense qu’environ 0,4 % des sommes consacrées à la recherche et au développement.
 
Quant au plan d’actions de Lagos, adopté parles Chefs d’État africains en 1980, qui recommandait aux pays du continent de consacrer 1 % de leur produit intérieur brut à la recherche et au développement est resté voeu pieux.
 
Quarante ans après, pas plus de trois pays ont commencé à accorder à la recherche les moyens nécessaires. Et comme ça ne fonctionne pas sur le mode abracadabra, nos chercheurs ne seront pas en mesure de trouver un vaccin contre le Covid-19, et nous non plus ne tolérerons pas les sorties hasardeuses de chercheurs qui gagneraient à retourner à leurs éprouvettes plutôt que de jouer aux stars du petit écran.
Oumou Dosso


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