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Côte d’Ivoire : Ne sommes-nous pas en plein Didiga ?

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Tiens ! Cela fait plus de dix jours que nous n’avons pas entendu d’insultes publiques. Aurions-nous été gagnés par la sagesse ? Espérons-le.
Le débat politique peut être dur, âpre, sans pour autant que l’on perde la bonne éducation et le bon ton. Croisons donc les doigts pour qu’il en soit définitivement ainsi, car le spectacle que nous avions donné de nous-mêmes les semaines passées ne nous avait guère honorés. Mais si le bon ton commence à régner en Côte d’Ivoire, c’est à Paris que nous avons assisté à une scène pitoyable.
Des personnes, présentées comme des supporters de Laurent Gbagbo, ayant vu des employés de la Présidence ivoirienne débarquer des bagages devant un appartement à Paris, ont décrété qu’il s’agissait de valises d’argent et décidé de s’en emparer. Elles en ont été empêchées et ont été arrêtées. Il ne s’agit ni plus, ni moins que de la misère morale dans laquelle vivent certains de nos frères et sœurs émigrés en Europe et qui y ont raté leurs vies.
Ayons… une pensée pieuse pour ces personnes. Cela dit, pour parler de choses plus sérieuses, nous assistons à une nouvelle recomposition de notre paysage politique. Guillaume Soro, l’ancien président de l’Assemblée nationale, a créé, semble-t-il, son parti et tout indique qu’il se lancera dans la bataille pour le fauteuil présidentiel en 2020, même s’il dit attendre que le peuple l’appelle d’abord. On le sait, le peuple finira par l’appeler. Parfois le peuple en question se résume à quelques amis ou parents. Le nouveau parti, le Rassemblement pour la Côte d’Ivoire (RACI), pourra-t-il rassembler une majorité d’Ivoiriens autour de l’ancien chef de la rébellion?
Pour le moment, on y retrouve surtout des personnalités dont l’ancrage politique sur le terrain reste encore à démontrer. Il est vrai que Guillaume Soro a une bonne équipe de communication sur les réseaux sociaux, et se donne en ce moment l’image de la victime d’une grande ingratitude, mais cela nous semble plutôt insuffisant pour fabriquer des électeurs. Sans doute que sa cible est constituée des jeunes dont on dit qu’ils représentent la majorité dans le pays, qui sont plus accrochés aux réseaux sociaux et qui, a priori, ne se retrouvent pas nécessairement dans les partis traditionnels de leurs parents.
Il est possible que le parcours et l’ascension de Guillaume Soro fascinent une partie de la jeunesse de notre pays et qu’elle se retrouve en lui. Mais il existe une autre frange de cette jeunesse qu’un tel parcours rebute, parce qu’il est marqué par le sang et surtout parce que ces jeunes en ont souffert, comme en témoigne la lettre ouverte adressée par une jeune journaliste à M. Soro. Oui, quoi que l’on puisse en dire, la rébellion de 2002 a foudroyé de nombreuses vies, disloqué bien des familles et brisé les ambitions de bon nombre de jeunes gens.
 
Au-delà des jeunes, celui que ses supporters appellent le «Leader générationnel » lorgne aussi les militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) et il ne cache pas sa volonté de faire alliance avec Henri Konan Bédié, le Sphinx de Daoukro. Les ennemis de mes ennemis font souvent de bons amis. Le temps de faire tomber l’ennemi. Verra-t-on un ticket Bédié-Soro lors de la prochaine présidentielle, avec le plus jeune dans le rôle du candidat à la vice-présidence ? Cela n’est pas impossible. Et s’il arrivait à ce ticket d’emporter la mise, Soro pourrait espérer devenir président de la République avant une prochaine élection, compte tenu de l’âge de son colistier. J’ignore si une telle perspective enchanterait les militants du Pdci pour qui soutenir un tel ticket équivaudrait à envoyer directement M. Soro à la Présidence.
J’ignore aussi si des militants du Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) originaires de la région de Soro se laisseraient séduire par ce dernier, au point de le suivre chez Bédié dont le contentieux avec une partie de la population ivoirienne vient d’être réveillé par son ambition présidentielle. Avec qui d’autre l’ancien président de notre parlement pourrait-il faire ticket en dehors du président du Pdci? Laurent Gbagbo ou un candidat issu du parti de ce dernier? Cela semble a priori irréaliste mais, ne l’oublions pas, la politique ivoirienne est du « Didiga », c’est-à-dire l’art de l’impensable.
L’autre inconnue reste la candidature du Président Ouattara à un nouveau mandat. Rappelons-nous ce que le Chef de l’Etat a dit le 16 juillet 2018 lors de l’assemblée générale constitutive du Rhdp : « Je peux vous assurer que je ferai en sorte que le Rhdp continue de gagner ces élections pour nous permettre, en 2020, de transférer le pouvoir à une nouvelle génération. C’est important que les générations se renouvellent. Nous devons, le président Bédié et moi, travailler la main dans la main pour transférer le pouvoir à une nouvelle génération.» Et plus tard, dans son discours à la nation du 6 août 2018, il a précisé ceci : «Comme je l’ai déjà souligné, nous devons travailler pour transférer le pouvoir à une nouvelle génération, de manière démocratique en 2020. Notre pays est riche d’hommes et de femmes, jeunes et compétents, qui ont reçu une formation de qualité, qui ont appris à nos côtés comme nous avons appris aux côtés de nos aînés. N’ayons pas peur de passer le témoin. Faisons confiance à nos jeunes, tout comme nos aînés nous ont accordé leur confiance. »
Je crois que tout dépend de M. Bédié. Je pense que s’il renonce à être candidat, M. Ouattara n’aura aucune difficulté pour revenir sur ce qu’il a déclaré. Mais si M. Bédié persiste à vouloir être candidat, M. Ouattara le sera aussi. Et je serais étonné que Gbagbo ne cherche pas à l’être également. Mais lui, il a quelques obstacles à franchir avant de pouvoir prétendre être candidat. Mais en tout état de cause, si Ouattara et Bédié se retrouvent face-à-face, où se situera Soro? Il n’est pas exclu qu’il retourne à la maison. Tout comme il n’est pas exclu que MM. Bédié et Ouattara se réconcilient. Ne sommes-nous pas en plein Didiga ?
VENANCE KONAN



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