Les élections générales de 2020 ne sont plus qu’à 24 mois de nos portes. Déjà, les États-majors sont entrés en branle, abattant leurs cartes selon leurs illusions et leurs espoirs. Les alliances se font ou se défont, au gré de calculs politiciens qui sont loin d’être d’une exactitude mathématique …
Le seul avantage que ce spectacle se vante d’avoir, c’est de donner à chaque camp l’illusion de remporter le graal en octobre 2020 : la présidentielle ! C’est au nom de cette illusion que les politiques se déchirent, donnent dans le reniement de leurs engagements et de leurs alliances afin de se positionner pour la bataille de Kirina à venir.
Le PDCI-RDA vient de se retirer du RHDP au nom de cette illusion, convaincu que cela lui permettra de reconquérir le pouvoir d’État dans 24 mois, en chassant le RDR du palais présidentiel. Pour cela, il veut se donner tous les moyens, y compris en nouant une nouvelle alliance politique avec le FPI par exemple.
C’est au nom de cette même illusion que le RDR veut se perpétuer au sommet de l’État, y compris en formant un RHDP nouveau, sans le PDCI, mais avec d’autres petits partis ne représentant pas grand-chose sur l’échiquier politique national.
C’est toujours au nom de cette même illusion que les Forces nouvelles espèrent profiter de cette recomposition de la scène politique nationale pour hisser bientôt leur champion, Guillaume Soro, au sommet de l’État. Ses lieutenants, dont Affoussy Bamba, traitent désormais le Président Ouattara et le RDR de fraudeurs qui veulent triompher aux prochaines municipales et régionales par la malice de la triche. Pas mal pour quelqu’un qui a été ministre de M. Ouattara des années durant ! Alain Lobognon va jusqu’à proclamer la mort du RDR. Il ne resterait plus qu’à l’enterrer dignement !
Le FPI aussi espère revenir aux affaires en 2020 dès lors que Simone Gbagbo a été élargie et que tous ses cadres sont désormais libres, sans qu’aucune épée de Damoclès ne pèse plus au-dessus de leurs têtes. Quand bien même il aurait néanmoins à résoudre ses contradictions internes entre pro-Affi et pro-Sangaré – ce qui n’est pas la chose la plus aisée au monde -, il n’en demeure pas moins convaincu que son heure de revanche a sonné. Le RHDP tel qu’on l’a connu entre 2005 et 2017 garantissait la léthargie du FPI même réunifié pendant de nombreuses années encore. Mais cette fracture actuelle entre les deux plus grands partis de cette coalition constitue du pain béni pour les frontistes, qui n’ont jusque-là jamais reconnu avoir perdu la présidentielle de novembre 2010. Comme ils n’ont rien fait de mal, ils ne voient pas pourquoi ils devraient s’excuser auprès de la nation. Sans doute, estiment-ils que la nation leur doit des excuses et des réparations pour les préjudices subis depuis leur chute en avril 2011.
Chacun des quatre principaux camps s’enferme dans ses illusions, convaincu qu’il pourra conquérir, reconquérir ou conserver le pouvoir d’État en octobre 2020 si l’équilibre politique actuel se perpétue. Cela a l’avantage de préserver une certaine accalmie, factice et fugace. Cependant, je reste convaincu que la nation en paiera le prix. J’espère seulement que le prix à payer sera moins cher que celui que nous avons déjà payé en 2011 lors de la crise postélectorale passée.
Si nous sommes chanceux, deux des quatre camps tomberont au premier tour de la présidentielle de 2020 et il reste à savoir lequel des deux finalistes pourra bénéficier du soutien de qui parmi les deux camps perdants, ou des deux à la fois. Si la chose se résout ainsi de manière démocratique, nous serons heureux de cette première alternance de haute volée dans l’histoire de notre nation. Si nous tombons dans les travers du passé, il s’agira de savoir qui pourra s’imposer par les armes, cette fois sans l’aval de la communauté internationale. Prions tous pour que ceux qui ont déjà utilisé des armes à feu n’aient plus à les fourbir de nouveau pour hisser – ou maintenir - leur champion au sommet de l’État du bout des baïonnettes !
Dr Famahan SAMAKÉ.
