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Economie

Le regard de Hamed Koffi Zarour sur la semaine de l'emploi

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En prélude à « la semaine de l’emploi » qui se tiendra à Abidjan du 10 au 13 avril prochain, le ministre Sidi Tiemoko TOURE était l’invité du journal Afrique de TV5Monde il y a quelques jours. Sur la question du très controversé taux de chômage de 2.8% annoncé par ses soins, il a tenu à préciser que ce chiffre procède d’un calcul effectué sur la base des normes du Bureau International du Travail.
Il convient de souligner d’entrée que la définition de ce concept est très variable, en fonction des critères et notions qui y sont retenus. Il n’existe donc pas une définition unique et universelle du chômage, elle varie selon les institutions et les pays. Cette évaluation revêt un enjeu considérable, dans la mesure où elle permet de quantifier un phénomène socio-économique, déterminant l’orientation que doit prendre la politique économique d’un État. Pour des raisons de nécessité comparative, notre pays a fait le choix conventionnel de la définition que lui donne le BIT, sans s’interroger sur l’adéquation des critères qui y sont retenus, avec la réalité que vivent les pays sous développés comme la Côte d’Ivoire. La rigidité et la pertinence des critères retenus par le BIT s’appliquent à des sociétés dites développées, où il existe des structures de recensement et de prise en charge des sans emplois et demandeurs d’emplois. Dans ces pays le secteur informel est marginal et toutes les activités professionnelles et socio-économiques sont organisées, répertoriées et intégrées aux circuits institutionnels de l’économie, alors qu’en Afrique et particulièrement en Cote d’Ivoire nous avons affaire à une économie désarticulée, comportant un secteur informel considérable et une économie souterraine assez forte. Rappelons qu’en application de la définition (internationale) adoptée en 1982 par le BIT, la notion de chômeur ne concerne qu’une personne en capacité de travailler (15 ans ou plus) qui est à la fois sans emploi, qui en recherche un activement et qui est immédiatement disponible pour l’occuper.
Il est donc clair au regard de cette définition singulièrement restrictive, qu’il faut nettement distinguer les personnes sans « emploi institutionnel » au sens de l’économie formelle, de celles qualifiés de « chômeurs » à la condition impérative que les premières n’exercent pas durant la période de privation de cet emploi institutionnel, une activité temporaire ou réduite de survie, génératrice d’un revenu précaire et insignifiant. Autrement dit, il eu fallu que les pays pauvres, dépourvus de tout dispositif de récupération et d’assistance, et de tout système et amortisseurs sociaux, aient des sans emplois qui se laissent mourir, faute de pouvoir subvenir à leurs besoins primaires (logement, nourriture, vêtement, éducation) pour être considérés comme chômeur, suivant cette norme internationale, alors que ceux des pays développés jouissent d’une aide conséquente pour survivre dans la même situation privative d’emploi. On mesure l’aberration de ce choix, car les situations que vivent les chômeurs des pays du Nord sont diamétralement différentes de celles des pays du Sud. Un taux de chômage estimés à 2.8%, même sur la base des critères du BIT ne reflète nullement la réalité que vit la société ivoirienne. La Banque Africaine de Développement l’avait relevé il y a peu, en estimant à 80% environ, le taux de chômage et d’emplois précaires en Côte d’Ivoire. En effet, les emplois précaires ne sont pas assimilables aux emplois institutionnels. Puisqu’ils ne sont ni stables, ni pereins.
Il nous revient que le Premier Ministre Amadou GON, à l’occasion de sa conférence de presse du 14 février dernier, s’était félicité des « emplois massifs » générés par les travaux de construction des infrastructures. Nous avions indiqué à l’époque que ces emplois étaient précaires, parce qu’exclusivement occasionnels, ponctuels et non permanents. Ils ne sauraient servir d’éléments d’appréciation dans la lutte pour la réduction du chômage structurel. Par ailleurs, le ministre Sidiki Tiemoko affirme que pour résorber le chômage, le Gouvernement ivoirien a mis sur pied le Service Public de l’Emploi, qui a pour mission de développer les compétences des jeunes, par des formations complémentaires qualifiantes. Idem pour le Programme d’Aide à l’Embauche, créée pour favoriser l’employabilité en facilitant l’obtention de stages. Face donc à la difficulté pour les ivoiriens de trouver des emplois, le Gouvernement propose des compléments de formation. Ces initiatives sont très insuffisantes. Le manque de formation est certes un facteur considérable qui accroit les difficultés d’insertion dans le tissu socio-économique. Mais le problème dans notre pays, et en Afrique en général, est qu’on oppose systématiquement la sous-formation au problème de l’emploi, alors que l’offre de notre secteur privé est encore très faible, faute d’industrialisation et d’une trop forte concentration sur Abidjan. Il convient également d’assurer en amont de notre système de formation une meilleure adéquation entre les formations dispensées et les besoins réels du marché local, et de développer davantage les filières techniques et professionnelles, avec une plus grande implication du patronat et des chambres consulaires et des métiers dans celles-ci.
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Le thème retenu pour cette semaine de l’emploi est « l’agriculture secteur d’avenir pour l’emploi et l’entreprenariat des jeunes ». Ce thème nous réjouit, pourvu qu’il soit convenablement exploité et judicieusement orienté. Nous avions dit à travers deux publications, à l’occasion du 5ème Sommet UA-UE il y a quelques mois, que le secteur agricole, peut à lui seul résorber TOTALEMENT la question du chômage des jeunes dans notre pays. La Côte d’Ivoire, c’est de vastes superficies de terres cultivables, et un peu plus de 60% de populations très jeunes (- de 35 ans). Avec un tel atout, il est inconcevable que ce pays continue d’importer du riz, de la viande, du lait, et d’autres produits de première nécessité, alors que ce ne sont ni les terres, ni les hommes qui manquent pour en produire. Précisons que le secteur agricole ne se résume pas qu’aux ouvriers qui cultivent les champs. Il intègre de nombreuses autres compétences:
- Dans l’industrialisation nécessaire à la transformation locale de nos produits
-Dans la recherche et la culture de nouvelles espèces agricoles plus productives.
- Dans la production et la maitrise du secteur énergétique pour réussir le pari de la mécanisation de l’agriculture
- Dans les différentes technologies (NTIC), utiles à la compétitivité et à l’accroissement des performances de nos systèmes de production et de commercialisation.
Comme nous pouvons le constater, le secteur agricole est un immense vivier d’opportunités d’emploi, soit longtemps négligé, soit pas véritablement exploré. Mieux, en s’y engageant de façon déterminée, notre pays peut ainsi régler à la fois la question de l’autosuffisance alimentaire et combler une partie des besoins alimentaires de la sous-région.
Il est indéniable que l’Etat ne saurait absorber toutes les personnes en quête d’emploi. Mais il est impérieux pour lui de contribuer à les rendre compétitifs dans les domaines cités plus haut, pour lesquels les besoins sont pressants, certains, et sans cesse croissants.
Les jeunes dans les États fragiles comme le nôtre font face à d’autres défis encore, leurs possibilités économiques étant réduites par l'instabilité et le manque de capacités institutionnelles. Il est temps que nos dirigeants optent pour une politique de l’emploi qui soit unique en ce qu’elle adopte une approche écosystémique. Elle doit aborder les problèmes liés à l’emploi dans le domaine de l’offre, de la demande et de l’établissement de liens. Le Gouvernement doit déployer toute une panoplie d’interventions en matière de politiques, de recherche, de programmation et d'investissement ; et travailler à nouer de nombreux partenariats sud-sud dans ce sens.
Il y a énormément à faire sur la question de l’emploi. A ce titre, nous formulons les propositions qui suivent:
• Encourager et faciliter la création massive de micro-entreprises en milieu rural.
• Équiper (outre leur formation) les jeunes qualifiés pour leur permettre de démarrer des projets d’entreprise dans l’agroalimentaires
• Mettre sur pied des zones d’amélioration des compétences à proximité des groupements industriels afin de former les jeunes et les femmes pour des postes à temps plein avec les employeurs dans ces groupements.
• Amplifier la mise en place de laboratoires d’innovation et d'information qui infuseront de nouvelles idées, appuieront les entrepreneurs et mèneront des recherches de pointe.
• Réduire les risques liés au financement en fournissant des garanties accrues aux établissements financiers qui sont chargés de prêter aux jeunes entrepreneurs.



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