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Politique

Raqqa, un mois de «bataille finale»

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S'il aura fallu presque un an pour déloger l’Etat islamique de sa «capitale» syrienne, les ultimes semaines auront été particulièrement féroces.

Il aura donc fallu presque un an pour déloger l’Etat islamique de Raqqa, la «capitale» des jihadistes en Syrie, son centre de commandement «des opérations extérieures», «la ville modèle» de son califat autoproclamé. Plus de 30 000 hommes, environ 25 000 Kurdes et 5 000 Arabes, ont été mobilisés dans les Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par la coalition internationale. Retour sur une opération de longue haleine.
6 novembre 2016 L’offensive «Colère de l’Euphrate» est lancée. Elle vise d’abord à encercler la ville de 250 000 habitants, sous la coupe de l’EI depuis 2014. Tous savent que la bataille sera féroce. «L’EI défendra son bastion car la perte de Raqqa signifie sa fin en Syrie», a prévenu le ministre américain à la Défense, Ashton Carter.

Mai 2017 La reconquête de la ville elle-même débute simultanément sur six fronts, avec des raids aériens massifs de la coalition internationale. L’avancée dans les quartiers sud est très rapide. Fin juin, les FDS ont capturé «environ 25% des quartiers résidentiels» de Raqqa, où 100 000 civils sont encore pris au piège. Les combats se durcissent quand l’offensive approche des quartiers centraux, repris un à un. L’avancée se ralentit entre fin juin et début septembre, avant les longs jours «de la bataille finale». Les jihadistes de l’Etat islamique commencent à faiblir. L’EI diffuse trois à quatre fois par jour des vidéos. Il assure que les «assaillants» sont «noyés».
10 septembre Affrontements violents dans les secteurs centraux: hôpital pédiatrique, rue Tall Abyad, Thakaneh, et place de l’horloge. Les FDS annoncent 30 morts parmi les jihadistes. Le lendemain, des dizaines de civils parviennent à sortir des quartiers assiégés à l’ouest de Raqqa. Aux menaces de l’EI, certains répondent: «Mourir sous les raids de la coalition ou par vos balles… On est morts en tout cas.» Les jihadistes syriens qui laissent passer des civils sont arrêtés peu après par un chef de l’organisation. Il ne reste que 20 000 habitants dans les quartiers encore sous contrôle des hommes en noir.
12 septembre Prise totale du quartier de Thakaneh, site de la garnison française à l’époque du mandat en Syrie. L’Etat islamique avait installé les familles de ses jihadistes étrangers dans les vastes appartements de ce quartier bourgeois. Les boulangeries sont remises en marche après des mois d’arrêt dans les quartiers de Machlab. «C’est la fête»,commente une habitante sur Facebook. Le lendemain, au centième jour de «Colère de l’Euphrate», alors que les FDS réalisent une percée vers le centre de Raqqa, les jihadistes paniquent. Les combats s’intensifient avec la prise de bâtiments donnant sur le jardin Al-Rachid, proche du rond-point Al-Naim. Sur la place tristement célèbre comme théâtre des exécutions, un jihadiste, accusé d’espionnage au profit de la coalition, est égorgé puis crucifié.
15 septembre L’offensive s’accélère avec l’ouverture d’un nouveau front au nord de la ville, où sont concentrés les derniers combattants de l’EI, environ 500 hommes. Ils étaient cinq fois plus avant le siège ne les enferment. Beaucoup sont morts ou ont suivi des cadres de l’organisation, partis se réfugier à l’est, près de la frontière syro-irakienne. Les combats s’intensifient autour de la place Naim et de l’Horloge, appuyés par plus de 70 raids de la coalition. Les imams de Daech ne sont pas apparus à la prière du vendredi. Deux jours plus tard, les soldats du califat autoproclamé tirent sur les civils qui tentent de fuir vers les zones contrôlées par les FDS dans le quartier de Rumeilah. Un père de famille meurt d’une crise cardiaque en voyant les jihadistes tirer sur sa femme et ses enfants. Alors que certains soldats de l’EI volent les papiers d’identité de civils pour tenter de fuir, des raids de la coalition détruisent la grande mosquée Omar Abdel-aziz.
20 septembre La bataille «touche à sa fin», veulent croire les FDS, qui annoncent avoir pris 90% de Raqqa. Des «signes d’écroulement» des forces de l’EI se feraient jour. Un vent d’optimisme qui survient après la prise de plusieurs positions stratégiques dont celle de la base militaire, la division 17, qui surplombe la ville. A bout de munitions et de nourriture et sous le feu de l’aviation, les jihadistes ne peuvent plus résister. Menés par leur chef marocain, une trentaine d’entre eux se rendent en fin de matinée. Ils auraient été transportés vers une base militaire américaine dans la région de Kobane, près de la frontière turque.
24 septembre Des batailles féroces se poursuivent autour de la division 17 et du quartier de Rumailah – une voiture piégée explose près du quartier Ferdos, au cœur de la ville. Un raid de l’aviation de la coalition sur un immeuble de Haret al-Badou, au nord-est de Raqqa, fait au moins 30 morts. Des corps sont ensevelis sous les décombres. «A mesure que l’étau se resserre, la réaction de Daech devient plus féroce»,explique Jihan Sheikh Ahmad, la porte-parole des FDS. Un «conseiller» des forces spéciales françaises est tué par un tir d’obus. Deux jours plus tard, une attaque surprise de Daech se produit à l’est de Raqqa, dans une zone pourtant contrôlée depuis début juin. Deux groupes de jihadistes revêtent l’uniforme des FDS et s’introduisent à Machlab via des tunnels. Amaq, l’agence de propagande de l’EI, affirme que les jihadistes ont tué trois membres des forces spéciales américaines et blessé deux Français. Et tué une centaine de combattants des FDS.
28 septembre Un enregistrement audio d’Abou Bakr al-Bagdadi, le calife autoproclamé – donné plusieurs fois pour mort –, est diffusé pour la première fois depuis des semaines. Il encourage ses troupes à Raqqa, à Deir el-Zor et à Syrte (Libye), et promet que «l’Amérique va s’effondrer». Il appelle les sunnites d’Irak et de Syrie à la résistance. Ses hommes tentent une contre-attaque, avec l’objectif d’ouvrir une brèche pour pouvoir se replier vers Deir el-Zor. Mais les FDS reprennent rapidement le contrôle de la zone. Une réunion sur l’avenir de la gouvernance de Raqqa se tient à Rome avec un conseil civil constitué par les FDS. Mais sans représentants reconnus par l’opposition syrienne.
2 octobre Au moins 18 civils dont 4 enfants sont tués dans un raid aérien de la coalition. Les victimes puisaient de l’eau près du stade municipal, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Il ne resterait plus que 200 à 500 combattants, concentrés dans les quartiers du stade national et d’Al-Badou. Environ 50 raids de l’aviation sont recensés chaque jour. Trois jours plus tard, les combats approchent de leur «dernière semaine» promettent les FDS. Les derniers jihadistes sont retranchés dans l’hôpital principal de Raqqa, un stade de football et les quartiers résidentiels alentour, y compris la place Al-Naïm. L’hôpital a été transformé en une base militaire «lourdement fortifiée», selon porte-parole de la coalition internationale, l’Américain Ryan Dillon. L’ONU l’assure: 8 000 civils seraient encore pris au piège à Raqqa.
11 octobre Des discussions sont entamés pour évacuer les civils pris au piège, avant que ne soit lancé l’assaut final. «Le Conseil civil de Raqqa mène des discussions pour déterminer le meilleur moyen de permettre aux civils pris au piège de Daech de quitter la ville», indique la coalition. Et d’ajouter: certains civils «sont utilisés comme des boucliers humains par les terroristes». Les négociations portent sur une évacuation des jihadistes et de leurs familles vers Abou Kamal et l’est de la province de Deir el-Zor. Entre 400 et 600 combattants actifs de l’EI se trouvent encore à Raqqa, estime les FDS. Entre 800 et 900 autres seraient blessés. La coalition rejette une proposition de médiation des chefs de tribus du Conseil local. «Les combattants étrangers les plus durs vont sans doute se battre jusqu’au bout, affirme Ryan Dillon, alors que quatre ou cinq "locaux" se rendent par semaine, y compris des émirs.» Une rencontre aurait eu lieu entre un chef saoudien de Daech, des officiers américains et des FDS. Un habitant des quartiers nord confie avoir vu des bus aux abords nord de Raqqa se préparant à entrer dans la ville tandis que d’autres se trouvaient à l’est.
14 octobre L’accord d’évacuation est confirmé. Une vingtaine d’autobus sont mobilisés pour transporter les civils et les combattants syriens hors de Raqqa. Il ne reste que 3 500 habitants. Le lendemain, des photos de prisonniers sont diffusées. Ils sont emmenés par les FDS à Tabqa pour être interrogés. Les civils sont eux dirigés vers les camps de réfugiés de Ain Issa, à cinquante kilomètres au nord de Raqqa où ils seront également interrogés. Dans le même temps, une quinzaine de familles de différentes nationalités se livrent aux FDS. «La dernière chose que nous voulons, c’est que les combattants étrangers soient libérés afin qu’ils puissent retourner dans leur pays d’origine et causer plus de terreur»,assurait Ryan  Dillon. La ministre française des Armées, Florence Parly, déclare qu’il faut «neutraliser un maximum de jihadistes» à Raqqa, et que s’ils sont tués dans des combats, «c’est tant mieux».
16 octobre Les ultimes affrontements contre quelque 200 jihadistes étrangers retranchés sont décrits comme «les plus durs» par la porte-parole des FDS. «Les derniers combats vont mettre fin à la présence de Daech. Cela signifie qu’ils ont le choix entre se rendre ou mourir.» Vingt-quatre heures plus tard, «tout est fini à Raqqa, annoncent les FDS. Les opérations militaires ont pris fin. La ville est sous le contrôle total». La bataille et les bombardements ont fait au moins 3 250 morts, dont 1 130 civils, en quatre mois, selon un bilan de l’OSDH. «Félicitations à Raqqa! Même s’il ne reste plus grand-monde ni grand-chose à féliciter. Mais au moins les bombardements cessent», écrit sur Facebook un jeune originaire de la ville, aujourd’hui réfugié en Europe.
Hala Kodmani



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