Après la France, la Grande Bretagne, les Etats-Unis, le Japon, la Chine, l’Inde, le monde Arabe, etc., c’est au tour de l’Allemagne de tomber sous les charmes de Dame Afrique. En effet, depuis le 23 mars dernier, le pays de Angela Merckel tient son « Forum Allemagne-Afrique », premier du genre, à l’image des rencontres France-Afrique, Chine-Afrique, Monde arabe-Afrique et autres Commonwealth (Grande-Bretagne) et TICAD (Japon-Afrique) qui sont autant de cadres de rencontres de dirigeants de ces pays avec le continent noir, essentiellement autour des questions politiques et économiques. En l’occurrence, le forum Allemagne-Afrique qui s’est tenu, hier, en terre germanique, vise à familiariser les entreprises allemandes avec le « berceau de l’humanité » et à « combler le fossé en facilitant le dialogue, les relations d’affaires et les échanges commerciaux ». En un mot comme en mille, Berlin veut rattraper le temps perdu et son retard en matière de coopération économique avec un continent qui se présente, aujourd’hui plus que jamais, comme le continent de l’avenir.
Ce forum est une opportunité à saisir pour l’Afrique
Et l’on peut dire qu’il était temps, car, vu le potentiel et l’intérêt que le continent noir présente aux yeux des autres puissances dont certaines lui font une cour assidue de longue date, il était quelque peu incompréhensible que la première puissance économique européenne tarde autant à lui faire des avances poussées. D’autant plus qu’au plus haut sommet de ce géant du vieux continent, l’on est conscient que « l’Afrique apprécie particulièrement l’éthique du travail, la précision et la fiabilité allemandes » et que les entreprises allemandes ont besoin de nouveaux marchés. C’est dire si les deux parties ont beaucoup à gagner dans ce partenariat qui pourrait voir l’Aigle allemand renforcer sa position sur un continent où il est certes déjà présent sur le plan de la coopération technique et où il est aussi en train de marquer sa présence militaire, notamment dans les opérations de maintien de la paix, comme au Mali par exemple. L’Allemagne a d’autant plus intérêt à se réveiller que le retard accusé par rapport à certains de ses concurrents sur le plan des échanges commerciaux est quelque peu énorme. A titre d’exemple, en 2013, les échanges commerciaux entre l’Allemagne et l’Afrique s’élevaient à 60 milliards de dollars, pendant que dans le même temps, la Chine réalisait plus de 200 milliards de dollars de chiffres. Cela dit, l’on remarquera la particularité du format de ce forum qui réunit essentiellement des techniciens et des chefs d’entreprises, là où certains partenaires n’auraient pas hésité à en faire un jamboree des chefs d’Etat du continent. Faut-il y voir une marque du pragmatisme allemand qui veut aller à l’essentiel sans circonlocutions diplomatiques ? Quoi qu’il en soit, l’on notera que malgré l’histoire qui est la sienne, l’Allemagne a su redresser la tête et est une nation qui compte encore de nos jours. Ce n’est pas un hasard si elle est aujourd’hui, la première puissance économique européenne. Ce forum est donc une opportunité à saisir pour l’Afrique, car, en plus d’être la locomotive économique du Vieux continent, Berlin est un partenaire crédible, avec une réputation de rigueur. Et ce pays a l’avantage de s’ouvrir davantage au monde, au moment où l’Amérique de Donald Trump est quelque peu en train de prendre le chemin inverse, avec une politique de repli sur soi qui ne dit pas son nom, basée sur le slogan « America first ».
L’Afrique est un continent riche, mais les Africains, dans leur grande majorité vivent dans la misère
Pour sûr, avec le nouveau président américain, beaucoup de choses risquent de changer dans les relations Etats-Unis/Afrique, et le continent noir gagnerait à diversifier ses partenaires. En cela, l’on peut saluer au passage le déplacement du chef de l’Etat burkinabè, Roch Marc Christian Kaboré, en début de semaine en Allemagne, qui pourrait s’inscrire dans cet ordre d’idées. Reste maintenant à savoir si cette jeune fille à la peau d’ébène et aux lignes de gazelle qui fait l’objet de toutes les convoitises, est véritablement consciente de ses atouts et de ses charmes et si elle saura tirer au maximum profit de ces rapprochements avec les grands de ce monde, pour le bonheur de ses populations. Car, le paradoxe est que l’Afrique est un continent riche, mais les Africains, dans leur grande majorité, sont pauvres et vivent dans la misère. C’est pourquoi il est grand temps qu’en plus de la multiplication des espaces d’échanges, les termes de ces mêmes échanges s’équilibrent en faveur d’un continent dont l’économie reste encore vulnérable à un système d’échanges qui ne favorise pas sa croissance au même titre que celle de ses partenaires, et dont les populations tardent à profiter véritablement des fruits de l’exploitation de ses richesses. C’est une question de justice et d’équité.
« Le Pays »
