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Politique

Quand la CPI trahit la mémoire d’Outre-Tombe des victimes de la crise post-électorale ivoirienne

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"Pendant quelques semaines, des rumeurs persistantes ont perturbé la sérénité des moments que je savourais dans les limbes de mon repos éternel. Expérience transcendantale à laquelle j’ai été contraint par les escadrons de la mort lancés à mes trousses par un jeune leader politique qu’un certain juge italien aurait indignement sanctifié par son refus viscéral de le condamner pour ses délits de violence politique. Comble d’ironie et de répulsion : hier, une victime de l’ancien chef de guerre congolais, Jean-Pierre Bemba, est venue me rendre visite dans mon lieu de séjour éternel pour confirmer que le 15 Janvier 2019 le verdict du juge Cuno Jakob Tarfusse sur la crise postélectorale en Côte d’Ivoire est en effet tombé comme un couperet sur l’ombre de tous les pauvres innocents, qui, comme moi, ont fait les frais de la barbarie du régime du Front Impopulaire Ivoirien. Il est indéniable que beaucoup de ces innocents (moi y compris) seraient en ce moment en train de vivre sur la « Terre des Hommes » (Saint-Exupéry),si, et seulement si Laurent Gbagbo avait daigné bien reconnaître le verdict des urnes à l’issue des élections présidentielles de 2010. Mais hélas, il avait déjà fait de son credo ce slogan de mauvais perdant face à l’adversité politique : « On gagne ou on gagne ». L’histoire se souviendra donc que son refus a causé des tragédies irréparables qui n’ont laissé aucune chance de survie à des milliers de personnes qui ont été victimes des conséquences de la crise socio-politique que son entêtement morbide a imposé au pays, sous le signe de l’imposture.
Les mémoires des familles ivoiriennes (de tous les bords) sont encore ensanglantées par le souvenir tenace des bombardements et des tirs de mitraillettes, ainsi que par les scènes horribles de compatriotes lynchés et brûlés à vifs par les jeunespatriotes et miliciensà la solde de « Blé-Goudé-la-machette », et tous praticiens de l’ignoble article 125 (« pétrole 100 francs, allumettes 25 francs ») ; une milice dont les atrocités et les appels à la haine de l’étranger ont décimé les rangs de milliers de compatriotes soupçonnés de rouler pour Alassane Ouattara, qui était alors le challenger de Laurent Gbagbo lors des présidentielles de 2010.  D’Abidjan à Gagnoa en passant par Bouaké, les preuves de ces barbaries meurtrières foisonnent sous les déchets de « la dinguerie idéologique » de leurs principaux instigateurs. Mais le juge italien a étendu sa morve baveuse sur ces forfaits nauséeux en estimant que le dossier à charges présenté à la cour et dûment admis au profit des victimes n’étaient pas suffisamment crédibles (dans le fond et sa forme) pour entraîner la condamnation des bourreaux d’un régime sous lequel on a longtemps étouffé dans une ambiance sociale en déconfiture, où l’air était devenu presqu’irrespirable. Ils seraient innocents. Blancs comme neige. Nègres comme la misère de nos tropiques corrompues. Alors qui est responsable des quelques 3, 000 morts de la crise post-électorale ? Le verdict du juge italien de la CPI sonne comme une insulte à la mémoire de toutes les âmes fracturées sous le coup de la forfaiture politique. Insulte, mais aussi acquittement qui donne à tous les dictateurs des régimes bananières la licence de régner sans foi ni loi ; et de massacrer les civiles sans craindre, au demeurant, des conséquences judiciaires ou des représailles sous forme de sanctions pénales. Signe d’un nouveau soleil grippé par les manigances de la CPI : l’acquittement, tel est désormais le châtiment proportionnel aux crimes politiques. Les bourreaux se sont peints sous les traits de personnes victimisées pour berner une CPI dont des agents ont tenu à les rétablir dans leurs prérogatives d’innocence. Ce paradoxe révèle l’ignominie qui couvre de disgrâce et de honte cette institution, qui se veut pourtant honorable. Rions sous cape, pour cacher l’embarras, même si le rire finit par se muer en « pleurer-rire ».
Au regard de cette tragi-comédie, on s’étonne moins que « Cuno, le justicier » soit en l’occurrence devenu le symbole risible d’une cour pénale que les victimes de tous les conflits civils vomissent aujourd’hui comme l’incarnation d’une parodie de justice. Du Kenya au Congo en passant par la Côte d’Ivoire, de nombreuses victimes crient à l’injustice et au droit à la réparation, en dénonçant le verdict du Cuno comme un viol du « Statut de Rome », dont la Convention a créé la CPI en 1998 pour juger les individus accusés de crimes de guerre, d’agression et de crimes contre l’humanité. Je vous souhaite aussi de ressentir la stridence des cris de malédiction que d’autres victimes lancent du fond de leur tombe contre les réprobations du juge Cuno qui a érigé les bourreaux d’hier en anti-héros reconvertis, « depuis peu », en nouveaux thuriféraires de la réconciliation nationale. Aussi longtemps que ces anti-héros ne répondront pas de leurs crimes devant le tribunal d’une justice transitionnelle, l’injustice constituera envers et pour toutes les victimes une menace à l’œuvre de justice en construction sur le chantier de la cohésion sociale et politique. Ne sommes-nous pas tous des victimes en sursis sous les régimes politiques qui nous gouvernent, entre légalisme et arbitraire, entre état de droit et violation de droits humains? D’où la nécessité d’ériger comme emblèmes de notre démocratie des institutions judicaires fortes de nature à garantir « le concept de dignité égale pour tous les individus » (Charles Taylor, philosophe canadien) ; cela doit se faire dans le souci bien compris de procurer à tous le triple sentiment de sécurité, de liberté et d’équitéqui permet fondamentalement d’exorciser la tentation de vengeance face à l’injustice et à l’impunité.
 Car au fond, chaque fois que nous échouons à honorer ces exigences éthiques, nous devenons aussitôt l’épouvantail grotesque de l’Occident qui sait si bien tirer profit de nos conflits civils et de nos incompréhensibles guerres tribales et identitaires. Combien de fois n’ai-je pas entendu dire que les choses changeront bien un jour sous nos tropiques, avec l’évolution des mentalités. Après plus de 50 ans d’indépendances africaines, on est maintenant en droit de se poser cette question de l’écrivain martiniquais Aimé Césaire : « mon peuple quand hors des jours étrangers germeras-tu une tête tienne sur tes épaules renouées / quand donc cesseras-tu d’être le jouet sombre au carnaval des autres ou dans les champs d’autrui l’épouvantail désuet / demain, à quand demain mon peuple… » (Ferrements). L’affaire Blé Goudé-Laurent Gbagbo vient de révéler que nous demeurons la figure carnavalesque de l’Occident sur la scène théâtrale du Tribunal Internationale où nous poursuivons nos guerres fratricides. Sous le regard amusé et pitoyable du mercenaire blanc rompu aux arcanes de la mystification. Il en sera ainsi aussi longtemps que nous resterons « les jouets sombres » des démons intérieurs qui sont à l’origine de nos propres malheurs : je veux dire de nos propres « nègreries », pour paraphraser un auteur africain".
 
Propos d’Outre-Tombe de victimes de la crise Post-électorale
David Kambiré, Analyste Politique, New York, USA.



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