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Populisme et escroquerie politique en Côte d’Ivoire

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L’apparition, la construction, et la pratique du "populisme" en Côte d'Ivoire, revêtent différentes formes. D'une manière générale, il correspond à une instrumentalisation des couches populaires, par une partie de “l'élite “ politique, sociale et intellectuelle, au service d'ambitions personnelles ou de projets "démocratiques" de personnalités politiques et de certains relais du système. Elle se distingue par une proximité avec le peuple, non pas pour promouvoir les intérêts de celui-ci, par opposition à ceux de groupes d'intérêts appartenant à cette "l'élite" ou encore au 'cercle du pouvoir", en prétendant soit le représenter, soit porter sa voix contre les abus du pouvoir ( atteintes au droit et à la liberté, confiscation de l'appareil d'État et des richesses par un groupe), alors que ceux-là mêmes qui tiennent ce discours, encadrent les courants et mouvements de contestation, appartiennent au cercle du pouvoir ou y participent, ou encore appartiennent à l'élite dont elle dénonce les comportements abusifs et égoïstes.
 
A - L’idéologie de la facilité et de l’évitement :
 
Son utilisation constitue un moyen d’éviter les défis qui se posent à certains politiques, tant à leurs ambitions personnelles qu’à leur parcours pour la conquête du pouvoir. Les uns fuient la confrontation électorale, comme c’est le cas de certains partis politiques de l’opposition, au motif d’un système électoral non fiable et inéquitable. Pour mémoire, il convient de rappeler que le Président GBAGBO s’est présenté contre le Président HOUPHOUET-BOÏGNY sous le régime PDCI, et a pu en récolter immédiatement les dividendes politiques. Il a “gagné “ les élections par la suite contre le Général GUÉÏ, alors que celles-ci étaient organisées sous le contrôle du régime de dernier. Pareil pour le Président OUATTARA qui les a gagné sous un système contrôlé par le régime de la Refondation. Faut-il être au pouvoir pour accepter de participer à des élections ? Les autres contournent la difficulté de présenter une véritable offre politique (Projet de société, programme d’action), d’assumer leurs ambitions en construisant leurs propres partis politiques ou en s’appuyant uniquement sur ceux auxquels ils appartiennent, plutôt que de rechercher de vaines alliances, souvent contre-nature du reste. De ce refus et de la nécessité de se maintenir néanmoins dans la compétition politique, les uns et les autres en mal d’offre alternative, s’emploient à exploiter les frustrations, les réflexes ethniques, la fibre nationaliste, les appartenances religieuses, et empruntent au langage de la rue pour être dans l’air du temps et paraître populaire (communauté artificielle érigée en mode de communication). Cette dernière voie a été largement utilisée par la galaxie patriotique sous la Refondation, au point de célébrer la médiocrité, la vulgarité, la xénophobie et la violence, au détriment de la substance que pouvait lui apporter utilement son immense réservoir de matière grise. Ce qui est recherché au terme de telles démarches, est tout simplement le vote facile (sympathie à des personnes, à des idées trompeuses et à des attitudes surfaites, exploitant l'analphabétisme des masses et les émotions primaires). Il s’agit ni plus, ni moins d’une fuite en avant, du maquillage d’une profonde carence. C’est de la théâtralisation et de duplicité.
 
B - Le moyen de s’assurer un contrôle social
 
Ce type de populisme ne s’adresse pas à la politique intérieure. Elle s’adresse comme sous la Refondation à l’extérieur (anti-impérialisme, souverainisme, « complotisme », diabolisation de l’étranger, etc.) en occultant les tares et les faiblesses du système auquel il appartient, et les insuffisances de son mode de gouvernance (délabrement de la capacité de production, absence d’infrastructures, rétention de la démocratie, inexistence d’une recherche et développement endogène, insuffisance de la mobilisation des ressources internes, valorisation de l’innovation et des ressources humaines défectueuse, endettement sur-capacitaire, etc.). La force extérieure d’un pays ne se mesure pas à son discours, mais à ses capacités et ses atouts (force militaire, géopolitique, diplomatie, technologie, compétitivité de son économie, ouverture sur l’extérieur, diversité de son partenariat, attractivité de son environnement, potentialités et richesses), car le monde est gouverné par des rapports de force et des intérêts d’État. Il n’y a que cette réalité qui compte. Ceci ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’opposer frontalement à un système profondément inégal et injuste au plan international. C’est un autre débat (stratégie, méthode, étapes). Si ce type de populisme porte en effet en lui la révolte des peuples opprimés (histoire), et contribue au développement d’une vision de rupture avec le système de pensée qui a permis de les exploiter et de les appauvrir, en revanche, force est de constater aussi, qu’il évite de soustraire les masses populaires de l’emprise des leaders politiques nationaux qu’il soutient, quels que soient la nature de leur pouvoir et leur mode de gestion des affaires . Dès lors, il ne permet pas de responsabiliser les citoyens en leur ouvrant la possibilité de critiquer et de juger l’action gouvernementale et les choix du pouvoir qu’il protège et défend. C’est d’ailleurs, un crime de lèse-majesté dans ce système de pensée qui peut vous couter la vie ou votre fonction. D’ailleurs, cette peur est fortement installée dans notre société. En matière de politique intérieure on préfère vilipender et traquer ses adversaires ou concurrents politiques, organiser la déification des leaders et la prédation de l’économie post-coloniale, sans rien en changer de fondamental. On ne peut pas mieux aveugler le peuple sur les réalités de la politique intérieure d’un pays. Silence on s’occupe de l’extérieur, on défend officiellement et tambours battants notre souveraineté (souvent avec compromission et duplicité). C’est ainsi que se fait pour partie, le lit des dictatures Africaines. Nous en avons fait l’amère expérience en Côte d’Ivoire. Dès lors, ce n’est pas un mouvement protestataire ou de libération au plan national. C’est le contraire, c’est un mouvement d’asservissement et d’aveuglement du peuple. Il n’y a pas plus désespérant. Le progrès économique et démocratique procèdent d’un mouvement qui part toujours d’un point autocentré autour de soi-même, donc strictement centrifuge, pour se projeter sur l’extérieur, voire le conquérir et le dominer un jour. Autrement dit, on commence par balayer devant sa case. On commence par s’occuper de ses affaires intérieures, de la gestion de son pays, en vue de corriger nos propres défauts, avant de s’intéresser au dehors et de fustiger l’extérieur. Assumons nos responsabilités sans faux-fuyant. En conséquence aussi, faute de respecter cette démarche hiérarchique, il opère un détournement des préoccupations des masses (paix et harmonie sociales, bien être, commodités de vie, pouvoir d’achat, développement du pays, épanouissement des citoyens, couverture des besoins, éducation et socialisation des individus, liberté d’expression), au profit d’un pouvoir qu’il contribue à renforcer par inféodation au discours politique. Pour preuve, pendant le temps de ce type de discours et de comportement politique, la pauvreté a augmenté de 50% en Côte d’Ivoire dans le dernier quart de siècle et l’État s’est effondré (surendettement, délitement de l’Administration sous le poids de la corruption et de l’importance de sa sous-productivité), et nous avons connu une crise de violence sur une décennie (guerre civile et chasse à l’homme). Au total, les institutions de la Républiques ont été sérieusement abîmées par les conduites politique et sociales qu’il a introduites dans notre pays.
C - La sous-traitance politique
 
Ce type de populisme est confié à la jeunesse et à des intellectuels, travaillant pour le compte et les intérêts d’une chapelle politique ou d’une personnalité politique, en contrepartie d’avantages (rétributions diverses, attribution de fonds d’aide aux clubs de soutien, promotion professionnelle). C’est un système de corruption des consciences sur fond de démagogie. Il a présidé à l’éclosion d’une multitude de clubs et d’associations de soutien à X ou Y, d’une floraison de “mange-mil”, qui y trouvent un moyen de s’enrichir, de se faire connaître et de s’ouvrir des portes. Le phénomène a débuté sous la fin de règne du Président HOUPHOUET-BOIGNY (guerre de succession, compétition des profils). Feu mon frère et ami Antoine SOUDET (M. Tokogniny de B. DADIER) avait monté à Paris une pièce de théâtre sur cette tendance malsaine, pour en dénoncer le caractère économique et superficiel. Rappelons nous les clubs de soutien à certains ministres et Présidents d’institution sous le PDCI-RDA, puis ceux de la galaxie patriotique érigée en système institutionnel et mode de gouvernance.  Observons à nouveau sa réplique actuelle sous le RHDP dans une perspective électoraliste ou successorale. La jeunesse et les intellectuels, portés par des idéaux et une capacité de révolte, ont traditionnellement vocation à s’investir dans le champ de la transformation des mentalités et de la culture dans une société donnée, par une démarche critique. C’est le levain qui tire la pâte (révolution, réforme, changement). Dans le cas ivoirien, ils sont, hélas, chargés non pas de pousser le mouvement dans cette direction (idées, valeurs, propositions) pour induire un progrès et faire avancer le pays, mais pour s’attaquer à la personne des adversaires ou concurrents politiques et pour défendre vaille que vaille la personnalité politique dont ils servent les ambitions et les intérêts (gourou, fétiche, commanditaire et bienfaiteur). Ce type de populisme masque en réalité des dissidences non assumées ouvertement par les entrepreneurs politiques (divergence sur la ligne politique, querelles d’ambition au sein de groupements politiques). Dès lors, ils sous-traitent cette tâche au droit et à “l’élite”.
 
                                                            CONCLUSION
 
Les combats politiques peuvent être nobles, sincères et désintéressés. Ils sont nécessaires au progrès, à la bonne gouvernance et à la démocratie, tant qu’ils permettent de préserver la paix sociale, l’ordre public et constitutionnel. Ils ne doivent pas être dévoyés. En effet, le populisme n’est acceptable que quand le peuple et ses leaders, dénoncent la persistance des pratiques et politiques menées par notre élite, qui nous ont conduit tout droit dans le gouffre (guerre, frustration, pauvreté, inégalité sociale, chômage, violence, impunité, corruption, clanisme, népotisme, ostracisme) et défend les véritables intérêts du peuples, et non ceux de cette élite. Quelques exemples de combats auxquels sont identifiés les leaders qui les ont portés, même si le pouvoir corrompt et impose des contraintes, que la pression des forces dans le monde influence les individus et que ceux-ci ne peuvent pas posséder une personnalité parfaite. Je citerai Patrice Lumumba, Nelson Mandela, Thomas Sankara, Jerry Rawling, Lech Walesa, Luiz Inácio Lula da Silva, Martin Luther King, Che Guevara. Je m’arrête là pour éviter la polémique (Procès de l’histoire) ou d’apparaître radicaliste, sinon j’aurais pu citer Mouamar Kadhafi, Fidel Castro, Hugo Chavèz et bien d’autres. La Réforme (radicale ou progressive) a aussi permis des avancées spectaculaires dans certains pays (Russie, Japon, Chine, Angleterre, Suisse, Australie, Pays-bas, USA, France). Tous ces pays à un moment de leur histoire ont connu une révolution ou une réforme fondamentale, qui leur a permis de changer d’échelle, de franchir un seuil , un pallier significatif, par la force des idées et une volonté de changement, au profit du peuple ou de leur économie ou encore de leur système politique, et non au profit d’un parti politique, d’un clan, d’un groupe d’intérêts particuliers, d’une élite. Ce type de populisme productif est un véritable mouvement d’éveil, de changement et de transformation, et non un moyen subversif, un lieu d’invectives et un instrument de propagande ou de manipulation des masses. Ici, en Afrique et en Côte d’Ivoire, on veut changer de personnes à l’intérieur d’un système clos, d’une même élite, d’un même mode de gouvernance. Lorsque nous voulons nous en écarter, nous empruntons les voies de la régression, comme celle d’un populisme dévoyé et exsangue. Si nous persistons dans cette pratique, nous prolongerons indéfiniment le système qui nous a conduit dans le gouffre. La politique doit cesser d’être un fourre-tout (absence d’idéologie bien structurée, de projet de société, compromissions de toutes sortes), une autocélébration, un culte de la personnalité et un moyen de s’enrichir et de capitaliser des sympathies uniquement par démagogie ( promesses mensongères, exploitation des attentes populaires pour servir des fins personnelles) . La Côte d’Ivoire a besoin de vision, de réformes profondes et de projet de société, et non de passion, de rhétorique et d’irrationnel (émotion, sentiment, frustrations, jalousie, haine, fétichisme)
 
 
SOUMAREY  Pierre Aly



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