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Societe

Le Papy Biya à ses petits-fils ou l’attachement maladif au pouvoir

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Il vient, en effet, de s’adresser à la jeunesse de son pays. Comme un Papy qui s’adresse à ses petits-fils, le président camerounais leur a conseillé d’abord de faire un usage responsable des réseaux sociaux. Et l’on peut imaginer facilement  pourquoi le vieux en fait un sujet de préoccupation. En effet, par ces canaux, les jeunes ne se fixent aucune limite quant  aux critiques de la gouvernance de leur pays. Cette liberté de ton dérange au plus haut point, celui qui tient les commandes du navire Cameroun depuis 1982, date à laquelle il a succédé à Amadou Ahidjo. Et à cette date, bien des jeunes auxquels il s’adresse aujourd’hui, n’étaient pas nés. C’est donc un grand-père de 85 ans qui s’adresse à ses petits-fils. Le décalage d’âge entre l’émetteur du message et les destinataires est tout simplement effarant.
Ce discours est un non-évènement
 
Dans le même message, le président camerounais a ensuite brandi les hauts faits de son armée face à Boko Haram. Extrait : « la capacité de nuisance de Boko Haram a été considérablement réduite, la situation se stabilise dans le sud-Ouest et le Nord-Ouest ». Paul Biya a enfin invité ses « chers jeunes compatriotes », pardon ses chers petit-fils, à devenir « les acteurs » de leur  « destin » en prenant une part active au scrutin de cette année. Il a notamment laissé entendre ceci :  « 2018 sera une importante année électorale. Tous ceux qui auront 20 ans ou plus, devraient exercer leur droit de vote. En votant, vous accomplirez un acte de citoyenneté responsable. Vous deviendrez ainsi les acteurs de votre destin ». Ce discours, en réalité, est un non-évènement. Car tous les Camerounais et Camerounaises, qu’ils soient jeunes ou vieux, s’attendaient à ce que leur président leur révèle ses propres intentions politiques sur l’élection de cette année. Ils attendaient de lui qu’il leur dise, de manière univoque, si oui ou non il  sera encore dans les starting-blocks cette année. Ils l’attendaient d’autant plus sur ce terrain, pour trois raisons essentielles. La première est liée au fait qu’il a déjà passé 36 ans à la tête du Cameroun. Ce qui fait de  lui, avec le président de la Guinée équatoriale, Obiang N’Guema  Mbasogo, les présidents africains encore en exercice dont la longévité au pouvoir est tout simplement hors norme. La deuxième raison, qui a d’ailleurs un lien avec la première, se rapporte à son âge. Du haut de ses  85 saisons bien écoulées, puisqu’en Afrique on évalue l’âge en termes de saisons, l’on pouvait légitimement s’attendre à ce qu’il dise ceci : « le temps a fait ses effets sur moi. Je n’ai plus l’énergie nécessaire pour conduire efficacement  les affaires du Cameroun. Je ferai donc prévaloir mes droits à la retraite ». La troisième raison se rapporte à son état de santé. Ses compatriotes, jeunes et vieux, auraient certainement voulu qu’il les rassurât sur ce point, et cela d’autant plus que tout le pays bruisse de rumeurs incessantes et persistantes selon lesquelles leur président est mal  en point. De tout cela, le vieillard n’a pipé le moindre mot. Et c’est le lieu de lui rappeler le bon comportement de son illustre prédécesseur, Amadou Ahidjo. En effet, ce dernier, se sentant diminué par la maladie, n’avait pas hésité à passer la main à un autre Camerounais. Et cet autre Camerounais avait pour nom, Biya Paul.
Les longs règnes préparent le chaos
 
Certes, Amadou Ahidjo n’était pas un exemple de démocrate, loin de là, mais il faut reconnaître qu’en cédant le pouvoir pour cause de  maladie, il a posé là un acte de bon sens et d’élégance politique. Comparaison n’est certes pas raison, mais Paul Biya aurait posé un acte de sagesse, s’il avait profité de sa traditionnelle adresse aux jeunes de son pays pour leur signifier qu’il y a un temps pour tout, y compris la dévolution pacifique et républicaine du pouvoir d’Etat. S’il avait tenu ce langage de sagesse, nul doute que les jeunes Camerounais qu’il dit aimer tant, l’auraient applaudi à tout rompre. Et au-delà de cette frange de la population, c’est tout le Cameroun  voire l’Afrique qui l’aurait encensé. Malheureusement, il ne l’a pas fait. De la part d’un homme comme Biya, cela ne doit  étonner outre mesure. Car, il ne s’imagine pas un seul instant une vie en dehors du pouvoir. Pour parvenir à ses fins, il n’a épargné aucun détail. Il a réussi le tour de force de mettre pratiquement tous les intellectuels du pays dans la « sauce », à  coups d’achat de consciences ou d’emprisonnements  arbitraires. Les rares intellectuels qui refusent encore de répéter l’évangile de saint Paul Biya sans murmure ni esprit critique, se retrouvent en exil d’où ils se font entendre de manière épisodique. Et l’on sait que ce genre d’opposition outre-mer ne perturbe aucunement le sommeil des dictateurs. En outre, Paul Biya a réussi l’exploit de museler son opposition politique. Le seul parti politique qui arrivait à lui tenir la dragée haute, est aujourd’hui l’ombre de lui même. Le SDF (Social Democratic Front), puisque c’est de lui qu’il s’agit, est à l’image de son géniteur, Ni John Frundi : inconstant et usé. Il reste la seule  famille politique de Paul Biya. Au sein de cette formation politique, il faut être fou pour évoquer la succession du chef. Et ce terme a été choisi à dessein. Car, Paul Biya ne gouverne pas le Cameroun, il règne sur le Cameroun. Et seule la nature peut contrarier ce règne. Et tout indique au Cameroun aujourd’hui, que la dévolution du pouvoir a de fortes chances de se faire de père en fils. En tout cas, ce mode de transmission du pouvoir d’Etat se susurre dans toutes les gargotes et  autres débits de boisson du pays. En attendant ce scénario-catastrophe pour le Cameroun, Paul Biya, s’il a encore un grain d’amour pour le Cameroun et plus particulièrement pour sa jeunesse, doit se rendre à l’évidence que les longs règnes préparent le chaos. Les exemples peuvent être puisés dans l’histoire. Et ils sont légion. Pour terminer, et pour revenir à la partie de son discours où il invite les jeunes à prendre en main leur destin en s’impliquant de manière active au scrutin de cette année, l’on peut se risquer à lui rétorquer que la meilleure manière pour les jeunes de le faire, est d’abord de débarrasser le Cameroun de Paul Biya. Et loin d’être de la subversion, cette invite est avant tout un acte hautement citoyen. Et c’est le seul qui s’impose, face à un papy de 85 ans qui est maladivement accroché à son trône.
« Le Pays »

 



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