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Le départ de Mugabé vu par Franklin Nyamsi : une lecture forcée de l’Histoire pour attaquer Ouattara et Gon

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Franklin Nyamsi ne change pas : dans une « Tribune internationale » un peu restée dans l’ombre, d’une longueur inouïe et qui n’a d’« internationale » que la caractérisation que lui accorde le philosophe, que nous nous proposons de mettre en lumière pour encore interpeller son patron, il procède à une lecture forcée de l’Histoire, en mélangeant philosophie, métaphysique politique et politique tout court. 
 
Sa conclusion : 1) « Les derniers autocrates et apprentis autocrates africains qui seraient tentés d’obtenir coûte que vaille un séjour ad vitam aeternam au pouvoir viennent de prendre un ultime avertissement sans frais à Hararé . Avec une population à plus de 70% composée de jeunes, l’Afrique aspire à être dirigée par des gens qui ont encore, comme elle, leur avenir devant eux, et non derrière eux. » 2) « Au plan des opinions africaines, majoritairement jeunes, le départ de Mugabe a été salué, non pas par mépris de sa stature historique, mais parce que les peuples africains en ont marre de ces gérontocrates qui les infantilisent tout au long de leurs interminables règnes. »
 
Exemple caractéristique de la lecture forcée de l’histoire par Nyamsi : « L’élection du Président Emmerson Thambuso Mnangagwa à la tête du Zimbabwé vient d’avoir lieu, avec sa prestation de serment ce vendredi 24 novembre 2017 dans un Stade de Hararé plein à craquer et débordant de reconnaissance envers les forces vives de la société, de l’armée, du parti au pouvoir et de l’environnement géostratégique du Zimbabwe ». Les mêmes « forces vives de la société » applaudissaient avec le même enthousiasme, il y’a quelques semaines, Robert Mugabe, sans oublier que l’âge du successeur n’est pas fait pour rassurer les forces jeunes. On sait ce que valent, sous une dictature l’adhésion et l’enthousiasme du peuple.
 
En réalité, il faut ramener le renversement de Mugabé par l’armée et par son propre parti, la Zanu-PF, à ce qu’il est véritablement : la mise à l’écart d’un Président devenu gênant pour le parti au pouvoir et pour le pays. Son successeur : Emmerson Thambuso Mnangagwa, issu du sérail, a été porté au pouvoir par l’armée, par la Zanu-PF et par les anciens combattants pour l’indépendance. Aucune de ces forces ultraconservatrices ne représente ce que Nyamsi nomme « la houle profonde de la conscience collective zimbabwéenne » ou le refus du peuple « de confier ses destinées à un clan jouissif, détaché de ses sacrifices fondateurs, le clan du G40 incarné et dirigé par Madame Grace Mugabe ». 
À aucun moment, Mnangagwa n’incarne mieux « l’esprit de l’émancipation zimbabwéenne que la sulfureuse Grâce ».  La crainte de l’ancien système de se voir écarté du pouvoir par Grâce Mugabe, perçu comme une usurpatrice, et donc de tout perdre, a entraîné cette réaction de l’armée.
Ce qui se passe au Zimbabwe est exactement le contraire de ce que prétend Nyamsi : « les Africains qui regardent la scène zimbabwéenne devraient donc comprendre, résolument, qu’on ne badine pas avec l’Histoire des luttes authentiques de son pays. ». 
Les Africains comprennent plutôt que le rôle de l’armée, pour des raisons qu’il serait facile à expliquer, n’est pas de défendre la démocratie, mais de maintenir au pouvoir, ad vitam aeternam (pour toujours, éternellement),  un clan, un groupe, un parti. La différence entre Mnangagwa et Mugabé est simple : Mnangagwa considère qu’il est temps de sortir son pays de l’isolement, de conduire un projet de développement en renouant avec la communauté internationale. Hormis cela , je ne pense pas que Mnangagwa fasse évoluer la structure autoritaire du pouvoir vers plus de démocratie.
Question : la dictature est-elle compatible avec le développement économique ? Une chose est certaine : les dictatures n’ont que faire de l’histoire des luttes authentiques des mouvements de libération du joug colonial. Au nom de l’indépendance nationale, Mugabé a promu, à marche forcée, une « indigénisation » des emplois et de la production, longtemps approuvée par le peuple. Cette légitimité historique est devenue le prétexte à son maintien au pouvoir pendant 37 ans, puisqu’il fut Premier ministre de 1980 à 1987 et Président de la République de 1987 à 2017. Or, depuis les années 1980, le Zimbabwe a connu une crise économique et sociale continue. Pour se maintenir au pouvoir, Mugabé , le libérateur, est devenu un dictateur.  Sa destitution n’est pas la victoire du peuple contre l’un des derniers autocrates africains, mais s’explique par la volonté de la vieille garde, dont Emerson Mnangagwa est le représentant, de conserver le pouvoir. 
La mission assignée par l’armée à Emerson Mnangagwa  n’est pas, comme le prétend Nyamsi, d’« assurer la paix sociale, relancer l’économie pour donner des positions socioprofessionnelles durables à la jeunesse, redorer l’image nationale et internationale de la démocratie au Zimbabwé par un respect plus scrupuleux des libertés fondamentales, développer un multilatéralisme diplomatique bénéfique pour son pays, tenir l’armée au service du peuple et non des pontes de la Guerre d’Indépendance, éviter toute patrimonialisation de type mugabéen à la tête de l’État , et transmettre pacifiquement le pouvoir d’État dans quelques petites années, lui qui a bien 75 ans. » Qui peut croire à ce conte pour enfants que nous sert Nyamsi dans son habituelle prose enflammée ?
 
Le détour par le Zimbabwe pour parler de la Côte d’Ivoire
 
Notre ami et collègue Nyamsi est loin d’être naïf. Qui n’a pas compris que le philosophe s’intéresse peu au Zimbabwe et qu’il parle en réalité de la Côte d’Ivoire? Qui est l’autocrate ivoirien qui, comme Mugabé , voudrait se maintenir au pouvoir en 2020 ? Alassane Ouattara ? Qui est l’usurpateur qui, comme Grâce Mugabé , voudrait s’emparer du pouvoir ? Amadou Gon Coulibaly ? Qui sont les combattants de la liberté appelés à libérer le pays en 2020 ? Les ex-rebelles ? L’armée ? Au profit de qui ? Celui qui incarne, aux yeux de Nyamsi, la légitimité historique de la libération du peuple Ivoirien ? Soro ? Comme il ne peut plus attaquer de front Alassane Ouattara et Amadou Gon Coulibaly , Guillaume Soro ayant accepté de s’inscrire dans une « paix des braves » (mais jusqu’à quand car on sent l’impatience d’en découdre ?), et ayant choisi de rejoindre l’organigramme du RDR, où il occupe le rang de vice-président, Nyamsi nous amène faire un tour au Zimbabwé. Mais, personne n’est dupe.
Là encore, à propos de la Côte d’Ivoire, Nyamsi procède à une lecture forcée de l’histoire récente du pays. Il délivre une parole politique qui avance masquée, à grands renforts de « maquillages » historiques, philosophiques et littéraires ; en réalité, il distille le poison lent d’une analyse partisane qui justifie par avance un coup d’État militaire en 2020 au profit de Soro.
Dans son livre, Par-delà le bien et le mal, Nietzsche définit ainsi la philosophie : « Pour l'essentiel, la pensée consciente d'un philosophe est en secret presque entièrement conduite par ses instincts » Chez Nyamsi, l’instinct est, incontestablement, un instinct de mort, puisqu’il en appelle sans cesse à l’utilisation de la violence dans la conquête du pouvoir. Les Ivoiriens qui, depuis 2010, ont toujours choisi les urnes contre les armes, faisant ainsi preuve d’une grande maturité politique, ne laisseront pas les Nyamsi de tous poils organiser les grandes manœuvres de la violence pour 2020.
 
Justice Konan



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